blason de La Roche

Le bois du Pontois

accueil


Merci Christiane,
et Jean-Paul,
pour cette visite guidée
du Pontois
le 9 juin 2017

  1. La chapelle et les cahutes
  2. Les grottes
  3. Le milieu naturel
  4. Le bois du Pontois pendant la 2è guerre
    • Les résidents en baraques
    • La rafle du 10 octobre 1942
    • La stèle des fusillés
  5. Cérémonie druidique... en 1987 < 9/4/23
  6. Articles de presse
  7. Sources des informations
Chapitre précédent :
le château du Pontois
Les autres manoirs et châteaux
de La Roche-Maurice :
- Keraoul
- Kerlys
- Kernevez
- Kerfaven
- Keramer
- Le Roc'h Morvan
- Synthèse

La chapelle et les cahutes

L'allée qui part de l'arrière du manoir conduit directement aux ruines de la chapelle, distantes d'une centaine de mètres seulement.


Allée

Cahute de gauche

Les cahutes :

A l'approche des ruines, cette allée aujourd'hui peu pratiquée, se réduit à un chemin forestier qui monte entre deux cahutes de pierres d'environ trois mètres de hauteur. Les cahutes ne comportent qu'une seule ouverture sur le devant, la porte permettant d'y entrer. L'arrière est en pente recouvert de terre. L'intérieur est circulaire et le côté interne du mur, de celle de droite, est incrusté de petits coquillages. Ceux-ci "sont organisés en divers motifs (guirlandes de moules, fleurs en moules ou ormeaux...) sur fond de bigorneaux".

La raison de la présence de ces cahutes n'est pas définie, elle pourrait être religieuse car ces constructions font penser à l'ermitage de saint Hervé à Lanrivoaré.

Mais pour les propriétaires du lieu "ces bâtiments, appelés folies de jardin ou fabriques de jardin sont caractéristiques de la mode des jardins d'agrément à la fin du 18è siècle. Ici, ce sont des grottes mais ailleurs ce sont des temples, pyramides, pagodes, etc..."

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Les coquillages


Cahute de droite

La chapelle :

On rentre dans la chapelle par une porte latérale en empruntant un escalier de 6 ou 7 marches. A droite de cette porte, il y a une fenêtre. Face à celle-ci sur le mur opposé, on trouve une autre fenêtre, l'autel était situé entre ces deux fenêtres contre le mur du pignon Est.

La chapelle est très ancienne. Elle a été dédiée à Saint Guillaume. On peut penser qu'elle a été construite par Guillaume Le Pontois, sieur dudit lieu, décédé en 1663. Au moins deux de ses filles y ont reçu la bénédiction nuptiale : Jacquette qui épousa en 1657 Maurice de Poulmic, sieur de Traonhuel  , et Jeanne mariée en 1661 avec René Joseph Charles, sieur de Kerinou.

X"quibus in missa celebratione dedit nuptialem benedictionem apud le Pontois in sacello Sti Guillermi magister Joannes Feret pbr"
= "à qui lors de la célébration de la messe Maître Jean Feret prêtre donna la bénédiction nuptiale dans le petit sanctuaire de St Guillaume près du Pontois"

La chapelle est inventoriée par le chanoine Paul Peyron dans Les églises et chapelles du diocèse de Quimper : "On signale en 1804 à La Roche, la chapelle du Ponthoy à M. Guimar, et celle de Keraoul à M. Ollivier".

En 1891, alors que Stéphanie de Lavillasse vend le domaine du Pontois à Eugène Belin, on peut déduire, par le contrat de vente, que la chapelle était encore fonctionnelle et pouvait être utilisée pour le culte : "Tous les objets mobiliers considérés comme immeubles par destination ... seront la propriété de l'acquéreur, et pour éviter toutes difficultés et toutes méprises à cet égard, il est expliqué que les bancs mobiles, pots de fleurs de la serre, garnitures de rideaux, glaces et tous les objets, non compris l'autel, qui se trouvent dans la chapelle demeurent la propriété exclusive de Madame de Cintré ".

En 1940, la chapelle Saint Guillaume avait encore sa toiture, en entrant tout de suite à droite se situait un bénitier coquillage, sur le sol des dalles de schiste apparentes, le choeur occupait pratiquement la moitié du lieu, avec l'autel de pierre appuyé contre le mur du fond.

Les Allemands, investissant le bois du Pontois en 1941, démolirent la toiture pour installer un mirador, d'où l'on pouvait apercevoir le pont de Plougastel et la rade de Brest. Depuis le mirador a évidemment disparu mais la chapelle en a souffert.

Le pignon Ouest avec ce qu'il reste la niche qui accueillait probablement la statue de Saint Guillaume.

L'intérieur de la chapelle aujourd'hui, et sous la petite ouverture au plafond le mur où se trouvait l'autel. Le sol est recouvert de gravats cachant les dalles de schiste.

Les grottes

Les grottes, celle de Lourdes et celle de Ste Hélène, sont situées dans l'affleurement de quartzite sur lequel est bâtie la chapelle.

Elles sont 12 mètres en contrebas de celle-ci au bord d'un petit chemin forestier qui permet de longer le bloc de rochers par le nord.

Les statues de la Vierge et de Ste Hélène ont disparu, mais on peut voir encore le crochet rouillé qui retenait celle de Notre-Dame de Lourdes.

Tout près de là, on arrive sur la cuisine de "Julot", l'homme des bois, et ensuite à sa chambre.

"Julot", Jules Peruzotti à l'état-civil, était arrivé là dans les années cinquante. Il vécut douze ans dans ce parc, même durant l'hiver 54, fort rigoureux.

La chambre de Julot

   La cuisine de Julot (fouille en cours par un archéologue le 9/6/2017).
  La pierre en surplomb garde encore quelques traces de fumée.

Voilà un habitat assez rudimentaire.

Fort heureusement, notre ermite était aidé par une bonne personne de La Roche. "Il passait du temps chez Marie Moal au bar de l'alimentation. Marie le nourrissait et lui lavait son linge. Elle vendait, dans son commerce, les champignons qu'il avait ramassés dans le bois".

Un ermite à La Roche-Maurice par Joseph Abiven

Jules Peruzotti naquit le 1er septembre 1901 quelque part en Italie. Jeune homme, il émigra en France et s'engagea dans l'armée. Au mois de mars ou avril 1940, il fait partie du régiment de chasseurs alpins transitant vers la Norvège et qui fit relâche à La Roche-Maurice pendant huit ou quinze jours.

En 1952, revoilà notre ancien soldat de retour sur les bords de l'Elorn, la région lui avait plu énormément. Notre Julot, car c'est de lui qu'il s'agit, trouva du travail dans une entreprise du bâtiment de la région et fut hébergé dans les anciennes baraques allemandes du Pontois et ce, jusqu'à leur démolition. Celles-ci au nombre d'une quinzaine, furent construites en 1941 au sud-est de la propriété par la Kreigsmarine. A la libération, deux demeurèrent en place et les autres, démontées et transportées à Brest, servirent de logement à la population sinistrée.

Son patron lui construisit ensuite une cabane pour son logement. Il s'intégra facilement à la population et devint très connu des Rochois. Au bout de quatre ou cinq ans, notre homme voulant sans doute vivre en osmose avec la nature : les arbres, les oiseaux, les rochers, décida d'arrêter de travailler et de quitter sa demeure. Il jeta son dévolu sur le bois du Pontois. L'allée du même nom et les maisons aux alentours n'existaient pas encore ; cela rendait les abords de la futaie beaucoup plus discrets. Le bois avait déjà connu la hutte des sabotiers dans l'entre-deux-guerres. Mais notre Julot ne prendra pas exemple sur ces derniers.

Il avisa pour demeure deux blocs de silex. Le premier pour sa "cuisine" dans le creux de deux rochers chapeautés par un troisième, exposé au nord et donc abrité des pluies et vents dominants. L'hiver, il y avait du feu en permanence alimenté par le bois mort ramassé dans la journée. Deux pierres servaient de trépied et un rondin de bois en guise de banc, pas de table. Tel sera le mobilier de sa cuisine en dehors d'une maigre vaisselle.

 

Son alimentation ne sera pas opulente. L'été, il se nourrissait de fruits sauvages tels que mûres, noisettes, myrtilles et châtaignes à l'automne. Les chasseurs lui apportaient de temps en temps quelques gibiers, principalement des renards, dont il mangeait les cuisses, non sans les avoir fait faisander pendant plusieurs jours, suspendus à un arbre à l'entrée de sa grotte. Les poules ainsi que les reptiles faisaient également partie de son "festin". Toutes ces viandes étaient cuites et mijotées dans une sauce au vin dont lui seul avait le secret. En hiver, quelques rares personnes lui apportaient quelquefois un peu de nourriture. Mais jamais il ne quémandait quoi que ce soit. A l'automne, sa principale occupation était la cueillette des champignons. On le rencontrait très souvent, les yeux rivés au sol à la recherche de ce précieux comestible. La récolte faite, il prenait la direction des restaurants de Landerneau, sans oublier d'en laisser au passage à son grand ami, le Docteur Pouliquen, chirurgien à l'hôpital. L'argent ainsi acquis servait à sa subsistance car, à part ceci, on ne lui connaissait pas d'autres apports pécuniaires.

La "chambre à coucher" était distante d'une quarantaine de mètres de sa cuisine. Elle se trouvait sous un autre rocher, exposé plein sud. La pièce très rudimentaire ne comportait absolument aucun meuble. Jules dormait à même le sol sur un peu de paille et des haillons, recouverts tout de même d'une couverture. Notre ermite passait les journées à arpenter son "domaine", à écouter les oiseaux chanter, à admirer la nature. Nul n'a connu aussi bien que lui chaque rocher, chaque arbre, on pouvait dire qu'il faisait partie de la faune.

Qu'il pleuve ou qu'il gèle à pierre fendre, Jules Peruzotti vécut ainsi une dizaine d'années. Le sabotier dans sa hutte et même les moines de nos monastères feraient piètre figure à côté de cette existence.

Publié dans Terre d'embruns - Les aînés ruraux racontent
Ed. Cheminements, gens d'ici 2005.

Le milieu naturel

L'Inventaire National du Patrimoine Naturel (INPN) répertorie les Zones Naturelles d'Intérêt Ecologique, Faunistique et Floristique (ZNIEFF) et en signale une dans les bois du Pontois associée à celle du Roc'h Morvan. Cet inventaire s'est aussi intéressé à Pont-Christ, où l'on trouve à peu près les mêmes caractéristiques, on y trouvera des photos que je ne reproduis pas ici.

Descriptif synthétique :

Les rochers signalés ici font partie d'une succession d'affleurement de chicot de quartzites qui poursuit celle que l'on voit à Pont-Christ : gros rocher surplombant le village et, plus à l'est au-dessus de Gorrequer, le "Trou du Bonnet Rouge" et la "Roche Percée".

Milieux principaux : hêtraies à Ilex et Taxus riches en épiphytes, et rochers ombragés à suintants dans le secteur de la Chapelle ruinée ; Roc'h Morvan : pelouses siliceuses ouvertes et rochers exposés à ombragés en atmosphère fraîche, avec localement des stations plus calcaires (fortifications du château).

Les espèces remarquables sont les suivantes :

Flore :
dans le secteur de la Chapelle ruinée, présence de 3 fougères protégées au niveau national :

/!\ Les liens pointent sur les photos incluses dans l'article similaire pour Pont-Christ.
  1. le dryoptéris atlantique (Dryopteris aemula) en quelques points du bois,
  2. l'hyménophylle de Tunbridge (Hymenophyllum tunbrigense) présent en plusieurs endroits sur les rochers du sous-bois,
  3. et le trichomanès élégant (Trichomanes speciosum) ce dernier uniquement présent sous sa forme de prothalle ;
et sur la butte de Roc'h Morvan,
    présence de Trifolium resupinatum et de quelques autres plantes peu communes, notamment Veronica agrestis.

Intérêt bryophytique :

  1. l'hépatique Plagiochila spinulosa est présente sur les rochers de la Chapelle ruinée ;
  2. sur le Roc'h Morvan existe une importante station de l'hépatique méditéranéenne-atlantique très rare en France : Marchesinia mackaii, et plusieurs autres bryophytes peu communes ont été relevées dans les environs immédiats du château.

Faune :
avifaune caractéristique des bois de feuillus sans espèces remarquables. L'escargot de Quimper Elona quimperiana, espèce protégée au plan national, est abondant dans le bois.

Conditions actuelles de conservation : il est proposé une gestion du bois de la Chapelle ruinée sous le régime de la « futaie jardinée », en veillant à conserver un couvert végétal dense. Toute la roche quartzitique brute portant le Château de la Roche-Maurice et ses enceintes ne doit faire l'objet d'aucun nettoyage pour éviter la destruction de Marchesinia. Les murs et murets et leurs jointoiements doivent aussi être préservés dans la mesure du possible, l'enlèvement éventuel de la végétation à ce niveau doit rester modéré, partielle, et ne pas concerner les bryophytes (pas de sablage, grattage, ou nettoyage avec de l'eau haute pression).

Le bois du Pontois pendant la 2è guerre

Les résidents en baraques :

Pendant la guerre, il y avait au Pontois (château et baraques) :

1 Après la Libération, le recensement de 1946 dénombre encore huit familles dans ces baraques du bois du Pontois.

Réparties en deux groupes, elles abritent 18 personnes, dont le fameux Jules Peruzotti, qui est dit "charpentier".


2 L'un d'eux était Cornelis Hogenhout, né à Nieuwer-Amstel en Hollande, le 11/12/1888, menuisier, charpentier. Il nous a laissé des quelques écrits (voir plus bas).

On disait qu'il y avait plus de monde dans le bois du Pontois que dans la commune de La Roche.

 

La rafle du 10 octobre 1942 :

Le 7 octobre, le SS Sturmbannführer und Kommandeur, Dr. Heerdt, adressa les consignes générales à l'intendant de police, à la préfecture régionale de Rennes : "Le 9 octobre 1942, les Juifs mentionnés sur les listes ci-jointes devront être arrêtés par les services de police placés sous vos ordres et livrés avant le 10 octobre au plus tard dans le camp situé sur le Champ de Mars. Outre les personnes indiquées sur les listes jointes, il y a lieu d'arrêter tous les membres de la famille sans égard quant à leur âge et à leur sexe (donc aussi les enfants) et de les livrer au même camp. ... "

Le Finistère comptait peu d'Israélites : 123 en tout, 83 dans l'arrondissement de Brest, dont une vingtaine de commerçants.

Un couple de déportés brestois arrêtés par la gendarmerie de Landerneau à La Roche-Maurice, le 10 octobre 1942. Ils ne sont pas revenus d'Auschwitz. (La vie à Brest de 1848 à 1948 par J. Foucher et G.M. Thomas)

Les listes de Juifs à arrêter concernaient les quatre départements bretons. La liste adressée au préfet du Finistère comportait 11 noms :

  1. Apolojg Ita, 13.9.1912, Polonaise, Brest, 37 rue Jean Jaurès
  2. Krouto Eugénie, 1.12.1886, Russe réfugiée, Douarnenez, 12 rue Laennec
  3. Krouto Jacob, 19.9.1882, Russe réfugié, Douarnenez, 12 rue Laennec
  4. Le Bris Blima née Menner, 25.9.1920, Polonaise, Brest, 41 rue Jean Macé
  5. Menner Adolphe, 3.2.1894, Polonais, Brest, 41 rue Jean Macé
  6. Menner Rosa née Bremberger, 1.1.1892, Polonaise, Brest 41 rue Jean Macé
  7. Perper Ihil, 28.12.1908, Roumain, Pleyben, au bourg
  8. Segaller Benjamin, 22.1.1882, Roumain, Plouenan, Kerlevenien Vian
  9. Selinger David, 28.10.1893, Polonais, Morlaix, 4 rue Gambetta
  10. Sternlicht Rebecca née Mazliah, 14.4.1897, Polonaise, Huelgoat au bourg
  11. Fried Ella née Hirschfeld, 1.1.1889, Allemande, Beuzec-Conq

Famille Mener - Adolphe, 48 ans, né le 13/2/1894 à Prystak (Pologne) et son épouse Rosa, 50 ans, née Bromberger le 1/1/1892 à Pryzthowice (Pologne), résidaient à La Roche-Maurice. Arrêtés parce que Juifs, ils sont déportés sans retour par le convoi n° 40 de Drancy vers Auschwitz le 4/11/1942. (source http://www.ajpn.org/commune-La-Roche-Maurice-29237.html)   

La brigade de gendarmerie de Landerneau fut avisée, par téléphone, le 9 octobre [1942], à 18 heures, qu'il lui incombait de procéder à l'arrestation de la famille Menner. Les parents et leur fille, Blima Le Bris, avaient quitté leur domicile brestois pour se réfugier à La Roche Maurice. Les gendarmes exécutèrent cet ordre, le lendemain à 5h25. La soirée et la nuit pour prévenir leurs victimes, aucun n'y songea ou ne le voulut. La mission s'avéra plus mouvementée que prévu :

« Après nous être assurés que l'ordre dont nous étions porteurs s'appliquait bien à elle [Madame Blima Le Bris], nous l'avons invitée à préparer ses bagages [...]. Nous nous sommes en outre présentés au domicile des parents de Mme Le Bris qui logent dans une chambre voisine.
Mme Le Bris a profité de ce laps de temps pour prendre la fuite, avec son mari, dans le bois du Pontois [...]. En raison de l'obscurité nous n'avons pu la rejoindre. Nous conduisons M. et Mme Menner à notre caserne à Landerneau. À 8 heures, continuant nos recherches au bois de Pontois, nous découvrons M. Le Bris dissimulé sous des branches d'arbres [...] Cet homme nous déclare que sa femme avait pris le train de 7h34 à la gare de La Roche-Maurice pour se rendre à Brest chez ses beaux-parents, au 41 rue Jean Macé. » Bien entendu le renseignement était faux, permettant à la fugitive de gagner une retraite sûre : « Le Bris Blima, née Menner (1920) n'a pas été découverte à Brest, elle est recherchée. »

À Paris, où il s'était finalement réfugié, le couple Le Bris échappa, en 1943, à une seconde tentative d'arrestation. Cette information est mentionnée, en décembre 1944, dans un rapport des RG au sous-préfet de Brest appelé à émettre son avis quant à la demande de naturalisation présentée par Blima Le Bris. La conclusion de l'enquête de police est tout à fait favorable, mais la raison invoquée, quelques mois après la Libération, pour lui reconnaître la citoyenneté française, est assez troublante : « Rien ne s'oppose à ce qu'elle puisse acquérir la nationalité française. Elle a d'ailleurs renoncé à la religion juive et s'est faite catholique. »

Très contrariante, toutefois, la fuite de cette jeune femme de La Roche-Maurice, Blima Le Bris. Sans elle, compte tenu que Jacob Krouto était déjà détenu et que Ita Apolojg avait quitté Brest, avec ses deux filles, depuis le mois de juillet, le succès de l'opération eût été total, illustrant à merveille le souhait de Pierre Laval, d'une collaboration étroite entre les polices française et allemande. (source Toczé & Lambert)

Informations récentes (1/11/2022) :
Les propriétaires du Pontois ont gardé des contacts avec Blyma Le Bris et sa famille, et m'ont communiqué ces informations.
Merci Jean et Christiane.
 

Adolphe Menner s'appelait en réalité Yankel Wallach. Il a utilisé les papiers de son cousin pour échapper à l'incorporation dans l'armée polonaise, qui était antisémite. Il a conservé ce nom puisque c'est avec ces papiers qu'il est arrivé en France.

Contrairement à ce qui a été écrit, une employée de la mairie est venu dire la veille de la rafle à la famille "Menner" de quitter La Roche (lire les détails sous la plume de Pierre Le Bris. La famille ne savait pas où aller. Blyma a réussi à se réfugier dans la nuit au château de Kéraoul, chez les Berthelot. Son mari l'a rejointe. Mais ils ont dû quitter le château, parce que Mme Mère Berthelot avait peur de cacher des juifs (à tort, puisqu'il n'y avait pas de poursuites ni des autorités françaises, ni des autorités allemandes pour ce motif  ). Ils ont dû chercher un autre refuge non habité.

Blyma Le Bris dans Le Télégramme du 1/11/2020

La famille témoigne dans l'Ouest-France du 8/6/2022

Blyma en janvier 2023, sur Tebeo. Voir la video
Merci à Jean Vinçot d'avoir mémorisé sur sa page FB le lien vers Tebeo.

Ajout le 14/5/2023

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Blanche Le Bris a fêté ses 100 ans le 25/9/2020 (source Le Télégramme du 01 novembre 2020)

À Brest, 100 roses pour Blanche

Elle vient de souffler ses 100 bougies. Un siècle de vie au cours duquel la Brestoise Blanche Le Bris aura subi l’horreur de la Shoah, assisté à l’explosion de l’Ocean-Liberty mais aussi croisé la route de Jack Kerouac et « eu la chance » de connaître ses arrière-arrière-petits enfants...

 Blanche Le Bris fait partie du cercle fermé des centenaires, riche de 21.000 membres en France, dont une écrasante majorité de femmes et 1.500 Bretons. (Photo Le Télégramme/Thierry Dilasser)

Elle s’excuserait presque que l’on s’intéresse à elle. « Oui, c’est vrai, je viens de fêter mes 100 ans. Mais je ne suis pas la seule… », avance-t-elle, de sa voix douce et fluette. Aussi discrète qu’alerte, malgré « des petits soucis d’audition », Blanche Le Bris a rejoint, le 25 septembre dernier, le cercle fermé des centenaires, riche de 21 000 membres en France (selon un décompte de l’Insee), dont une écrasante majorité de femmes et 1 500 Bretons. « Il me semblait normal d’avoir à faire plus d’efforts que les autres pour m’intégrer ».

Blyma, la « fleur » polonaise

Arrivée à Brest à l’âge de 2 ans en 1922, aux bras de parents juifs polonais fuyant les pogroms et aspirant à une vie meilleure, Blanche s’appelle alors Blyma (fleur, en polonais). « C’est quand mes parents m’ont inscrite à l’école qu’on leur a demandé de me donner un nom français », explique, 98 ans plus tard, celle qui, malgré une excellente scolarité, ne s’est jamais offusquée que ses bonnes notes ne lui ouvrent pas de droit à une quelconque bourse. « Il me semblait normal d’avoir à faire plus d’efforts que les autres pour m’intégrer », explique-t-elle dans un ouvrage (à diffusion familiale) rédigé par l’une de ses petites-filles, lors du premier confinement.

Élevée par des parents « pas du tout religieux », elle évoque une jeunesse « douce », entre « vacances à Saint-Pabu » et « balades au Trez-Hir ». Son Brest d’avant-guerre ? « Une ville pleine de bruit, de pluie et de joie », résume-t-elle. « La rue de Siam était alors étroite, très sympathique. Et il y avait le tram déjà. J’aimais beaucoup l’école et mes camarades, j’ai toujours été curieuse », se souvient-elle encore, avant de reconnaître ne s’être « sentie brestoise et bretonne » que bien plus tard.

En 1942, sa vie « bascule »

Rien, toutefois, qui ne l’empêche de se sentir « épanouie », jusqu’à ce que la guerre éclate. Son futur mari, Pierre Le Bris, est mobilisé. Elle fait le choix de partir chercher du travail à Paris : une tâche difficile du fait de « (sa) judéité » et de sa nationalité polonaise. Malgré les combats, Pierre et Blanche - convertie au catholicisme selon les exigences de son beau-père - se marient en 1941, à Quimper. Quand les bombes commencent à pleuvoir sur Brest, toute la famille se réfugie à La Roche-Maurice. Jusqu’à cette sinistre nuit d’octobre 1942, où « (sa) vie bascula ».

« Les gendarmes français sont venus nous arrêter, mes parents, ma fille Jacqueline, alors âgée de 6 mois, et moi », se remémore Blanche. Si cette dernière parvient à s’enfuir avec son mari et sa fille, les soldats français arrêtent ses parents, pour les envoyer en déportation. « Nous ne savions pas bien ce que cela sous-entendait... ». Embarqués en direction d’Auschwitz, ils n’en reviendront jamais. Les époux Le Bris parviennent, eux, à rejoindre Paris, après avoir dû « se cacher dans des talus ».

Les mois qui suivent sont « difficiles », emplis de « peur ». Jusqu’à ce soir de 1944 où, tandis que le couple a trouvé refuge dans une pension de famille, Blanche voit débarquer une milice composée d’un Allemand et de trois Français. Sa fausse carte d’identité ne les convainc pas. « Ils allaient m’embarquer mais la fin de la guerre étant proche, Pierre est parvenu à les soudoyer. On n’a jamais su comment ils m’avaient retrouvée... ».

« Le souffle, énorme, est passé au-dessus de nos têtes ».

À leur retour, Blanche et son mari retrouvent un Brest « dévasté ». Durant les premiers mois, comme il était impossible de s’y loger, ils habitent dans « une mansarde à Landerneau », qu’on leur « louait à prix d’or ». Des années « très difficiles », au cours desquelles le couple finit par s’installer rue Victor-Hugo, à Brest. « C’est de là qu’on était parti voir, avec ma fille alors âgée de 5 ans, le bateau qui brûlait dans la rade ». Au moment où l’Ocean-Liberty implose (26 morts, des milliers de blessés), « on était boulevard Gambetta : le souffle, énorme, est passé au-dessus de nos têtes… ».

Passé ce douloureux épisode, la suite sera plus douce. Parfumeurs puis grossistes, les époux Le Bris ouvrent une librairie, rue de Siam (en lieu et place de l’actuel Carré blanc). C’est là qu’ils feront la rencontre « décisive » d’un certain Jack Kerouac, venu en Finistère sur les traces de ses racines bretonnes, en 1965. Une époque où le couple fréquente aussi l’artiste brestois Pierre Péron, « un homme aussi doué qu’adorable ».

La nostalgie au placard

Près d’un demi-siècle plus tard, Blanche Le Bris, veuve depuis 2012, contemple ce passé sans nostalgie et « avec une vue déclinante : ce qui m’empêche de jouer au bridge mais qui m’évite aussi de voir mes rides », glisse-t-elle dans un large sourire. Les confinements successifs ? « Ils me rappellent la guerre : quand on s’arrête de vivre, sans savoir pour combien de temps… ». Un « mal nécessaire » que l’intéressée vit avec « fatalité », selon sa fille Jacqueline qui lui rend visite très régulièrement. Tout en gardant le contact avec les autres membres de sa famille - dont Oihan, le dernier de ses arrière-arrière-petits-fils - via Messenger. Ou comment regarder devant soi, encore et toujours.

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La stèle de fusillés :

Ce sobre monument qui s'harmonise à merveille avec le cadre naturel qui l'entoure, est dû au ciseau de M. Mazé, marbrier à La Roche. Sur la stèle sont reproduits de haut en bas, une croix de Lorraine, avec dans les coins les initiale H. P. (Honneur et Patrie), la dédicace "Aux victimes de la barbarie nazie" et le nom des victimes.

Roger Bras, historien de La Roche-Maurice, nous rapporte les événements suivants (extrait) :

"Après le débarquement du 6 juin 1944, les Allemands aux abois se replient vers l'est. La rage au coeur, les nazis multiplient alors les massacres.

Harcelés par le réseau "O.R.A." (Organisation de Résistance Armée - F.F.I et F.T.P. fusionnés dans l'O.R.A.) du lieutenant Noyon de Douarnenez, des soldats d'une division de parachutistes allemands, appartenant au corps d'armée commandée par le général Ramke, capture le 25 juillet 1944, une douzaine de résistants commandés par l'aspirant Thomas Le Moan de Ploare.

Plus tard, le sergent Herwin Fritz se vanta publiquement d'avoir puni des "terroristes" dans la nuit du 30 au 1er août 1944. Renseignés par un soldat allemand de la Wehrmacht, des Rochois découvrirent les corps après le départ des parachutistes allemands le 10 août 1944. Ainsi, périrent victimes de la barbarie nazie :

  1. LE MOAN Thomas - Aspirant F.F.I. né le 17.10.1914 à Ploaré, 30 ans.
  2. BOULIC Joseph - Sergent F.F.I. né le 19.03.1922 à Kerlaz, 22 ans.
  3. BROUQUEL Joseph, né le 21.12.1918 à Kerlaz, 26 ans.
  4. STRULLU Alain, né le 16.07.1916 à Kerlaz, 28 ans.
  5. GUEGUEN Henri, né le 16.02.1915 à Ploaré, 29 ans.
  6. LUCAS Pierre, né le 29.05.1925 à Ploaré, 19 ans.

En plus, de ces 6 résistants, Jean-François Queau, ouvrier agricole, fut fusillé pour n'avoir pas voulu céder son attelage. Il était natif de Pleyber-Christ". Son nom sera rajouté plus tard sur la stèle.

* * *

Le monument a été inauguré le 7/4/1947, en présence de diverses délégations représentant les organisations d'anciens résistants ; du maire de La Roche, M. Coat ; du recteur de La Roche, M. Cam et de nombreuses autres personnalités finistériennes. Le lieutenant Noyon, chef du maquis de Douarnenez, citera les patriotes inscrits sur le monument à l'ordre de la brigade et sur la poitrine de leurs parents, alignés devant la stèle, le capitaine Lambert épinglera la croix de guerre.

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Hommage à J.-F. Quéau. En plus de celle des six victimes, la mémoire de Jean-François Quéau, tombé en août 1944, et dont le nom est désormais gravé sur la stèle, grâce notamment à Joseph Abiven, propriétaire du Pontois, qui a donné de précieux renseignements, sera également commémorée. (Télégramme 1/3/2008)

... le 8/5/2008 : Les participants ont ensuite rejoint la stèle du Pontois érigée à la mémoire des six victimes tombées à cet endroit sous les balles ennemies en août 1944. Un hommage particulier a été rendu à Jean-François Quéau dont le nom est désormais gravé sur la stèle. Inscrit dans la mémoire. En août 1944, les Allemands, qui occupaient la ferme des familles Paugam et Quéau, désignèrent M. Paugam comme otage. Célibataire, faisant preuve d'une totale abnégation, Jean-François Quéau prit sa place et subit le même sort que les cinq résistants amenés de Landerneau. (Télégramme 14/5/2008)

Voici en complément, rapporté par Roger Bras, le témoignage de Joseph Abiven,
agriculteur et propriétaire du Pontois, qui a transporté les corps de six suppliciés au cimetière communal.

Résistants du bois du Pontois

J'ai été témoin de ces faits. Fin juillet 1944, un soldat allemand nous avait annoncé qu'il y avait un « cimetière de terroristes » dans le bois du Pontois.

Sitôt leur repli sur Brest début août, nous avons fouillé : les Allemands avaient creusé une vingtaine de casemates toutes recouvertes de troncs d'arbres ; cependant, une casemate avait été remblayée. Là se trouvaient les corps des 6 patriotes, 3 de la commune de Kerlaz, 3 de celle de Ploare, près de Douarnenez, empilés les uns sur les autres à l'endroit même où a été édifiée la stèle.

Ils étaient en tenue de travail (bleu de chauffe). La date de leur décès, 31 juillet, est je pense approximative. Ont-ils été tués au Pontois ? Certains Rochois les ont, paraît-il, entendu crier.

L'exhumation a eu lieu 6 à 7 jours après leur décès. Je les ai transportés en charrette à cheval, enveloppés dans des bâches de camions, au cimetière pour une sépulture provisoire, près du monument aux morts. La population Rochoise était rassemblée au bourg pour accueillir les dépouilles, tandis que flottait sur le vieux château le drapeau tricolore.

Les journaux ayant cessé de paraître au moment de la débâcle allemande, il a fallu attendre leur réapparition quelques jours plus tard afin d'y faire paraître un communiqué invitant les familles à venir reconnaître les corps. Des morceaux de vêtements ayant été prélevés sur chacun, nous n'avons décelé aucune mutilation sur les corps, pas d'oeil arraché ni de trace de balles. Par contre, tous avaient les mains liées derrière le dos avec des fils de fer.

Ils appartenaient tous les 6 à un réseau de résistance ; l'un d'entre eux avait, paraît-il, lier amitié avec un Alsacien mobilisé dans la Wermacht. Celui-ci les dénonça ; ils étaient tous porteurs d'un demi billets de 5 francs (preuve de leur appartenance aux réseaux).

Deux mois après le départ de la troupe allemande, une personne âgée, ramassant du bois mort au bois du Pontois, eut la désagréable surprise de découvrir, dans une tranchée, un 7e cadavre. Celui-ci, un ouvrier agricole de Pleyber-Christ, âgé de 62 ans, avait été réquisitionné avec son attelage pour replier la troupe sur Brest. Ce dernier a été abattu d'une balle dans la tête.

Je rappelle qu'au bois du Pontois, ces atrocités ont été commises, là où la Kriegsmarine avait édifié des baraquements qui, en ce temps, hébergeaient une partie des marins allemands, des cuirassés basés quelque temps à Brest.

Joseph ABIVEN

Le journal du Hollandais Cornelis Hogenhout
(transmis par Jean Vinçot)

On pourra lire le texte original et complet en Néerlandais, en suivant ce lien.
... et vous pourrez demander à Chrome de vous le traduire en français.

Cornelis Wilhelm Hogenhout est né à Nieuwer-Amstel le 11 décembre 1888. Le 25 avril 1918, il a épousé Alida Helena Catharina Sallé, avec qui il a eu six enfants. Cor Hogenhout a d'abord travaillé comme charpentier dans le bâtiment. Plus tard, il est devenu un entrepreneur indépendant. Il est décédé à la maison de retraite Sint Jacob à Amsterdam le 9 juillet 1976, à l'âge de 87 ans.

En janvier 1940, quelques mois avant le début de la Seconde Guerre mondiale, Cor reçoit un appel de la Bourse du travail pour aller travailler en France, à Brest, avec de nombreuses autres personnes de Hollande. Ce n'était pas la première fois qu'il travaillait en France. Il l'avait déjà fait auparavant, à Rouen, où il avait appris quelques mots de français qui lui étaient désormais utiles. En mars 1941, il part en train pour Brest, où il commence à travailler dans le port naval pour Dortmunder Union Brückenbau AG. Il y est resté jusqu'en octobre, date à laquelle il a été autorisé à rentrer chez lui en permission pour célébrer son 25e anniversaire de mariage. Il était censé y retourner, mais il était apparemment considéré comme trop vieux pour cela - il avait 53 ans à l'époque.


Voici un extrait résumé du journal de ses aventures :

Mardi 1er avril 1941 - Avis de départ de l'Office du Travail pour l'Ouest de la France.

Jeudi 3 avril 1941 - Levé à 5 heures et préparé pour le voyage. A 8h20, le train part, nous avons de bons compartiments. Les compagnons de voyage sont des professionnels de toutes sortes et viennent de différents endroits.

Vendredi 4 avril 1941 - Paris. À cinq heures du matin, nous avons été réveillés, sans rien manger ni boire, nous sommes sortis dans la rue, lourdement chargés et équipés de sacs. Après une dizaine de minutes de marche, nous sommes arrivés à la station Montparnasse. Ici, il y avait une grande agitation de soldats allemands, qui devaient tous être embarqués dans les trains, les passagers et nous, les 150 hommes. Nous sommes partis pour Brest. Il est remarquable que pendant le voyage nous ayons été constamment escortés par la police française, apparemment ils étaient très préoccupés par nous.

Par Rennes et Saint-Brieuc, nous avons atteint le grand port de guerre de Brest à 7h30. Immédiatement, nous sommes montés dans un bus, conduit par des soldats allemands, dans lequel nous sommes arrivés à La Roche vers 8 heures.

C'est là que se trouvait le Lager Rosa-Maria, bien caché dans les bois à flanc de colline ; un camouflage naturel. (Il s'agit du bois du Pontois, bien sûr). Il y avait déjà 400 hommes dans ce Lager [1]. Nous étions logés dans des baraquements, avec 12 hommes par pièce.

On nous a donné l'occasion de manger quelque chose, qui n'était pas très savoureux, du riz froid avec une sorte de soupe, dont les pommes de terre, la choucroute et l'humidité étaient les principaux ingrédients. Cette combinaison ne semblait pas satisfaire le désir de mon estomac, qui protesta violemment en le rendant. Ma réserve de pain s'est avérée utile pour remplir à nouveau le vide. Mes réserves s'étaient quelque peu amenuisées, car certains de mes compagnons de voyage n'avaient pas assez de nourriture avec eux, et aucune nourriture n'avait été fournie pendant le voyage. Ces gens étaient encore plus mal lotis que moi, car le dernier aliment qu'ils avaient mangé était le souper de la veille à Paris.

Après le dîner, nous sommes allés dans le village (La Roche-Maurice), où nous avons été frappés de voir que presque dans chaque maison, on trouvait du cognac au prix de 1 franc ou 2 francs le verre, ce qui est très bon marché, car le franc n'était que de 4 centimes.

Les dortoirs sont constitués de lits de camp dans lesquels deux places sont superposées, tandis que chaque homme dispose d'une armoire pour les vêtements et autres objets. Cette armoire peut être verrouillée.

Samedi 5 avril 1941 - Ce samedi, nous avons pu nous reposer des fatigues du voyage. Beaucoup de nos compagnons de camp ont réussi à consommer tellement de cognac qu'ils ont eu beaucoup de mal à retrouver leur place pour dormir. La conséquence était que tout le monde était interdit de sortie. L'un des colocataires, un ancien colonial, a été tellement impressionné par les plaisirs qu'il a eu une attaque continue de délire pendant la nuit. J'ai également fait la connaissance du Lagerführer inférieur, un vrai trouble-fête, un grand gueulard, mais un bon gars.

Dimanche 6 avril 1941 - L'interdiction de sortir du camp ne s'applique pas aux pratiquants pour aller à l'église. Résultat : de nombreux pratiquants qui, normalement, ne vont jamais à l'église. En conséquence, certains hommes s'enivrent.

Lundi 7 avril 1941 - Premier jour ouvrable. Environ 500 hommes devaient partir pour Brest dans des bus. Comme il n'y a pas assez de bus disponibles, nous avons dû rester dans le camp avec environ 250 hommes et nous avons fait un peu de nettoyage.

Mardi 8 avril 1941 - A 5 heures du matin, tout le monde est réveillé et à 6h30, tous se rassemblent sur la grande route de Brest. Maintenant, il y a assez de bus pour que nous puissions tous aller au travail. Nous sommes affectés à la firme Bergcamp, une autre partie travaille pour la firme Scheren. Il y a deux surintendants néerlandais, les poeliers, dont l'un est le surintendant principal. La zone de travail est située sur le chantier naval de Brest. Il y a environ 2.000 hommes employés, beaucoup d'Allemands (service du travail), de la RAF, mais aussi des Hollandais, des Français et des Belges. Nous travaillons sur une grande voie auxiliaire pour le transport de munitions, etc. Cette piste s'étend sur tout le terrain pendant 5 km.

A midi, on nous sert une soupe dans une cantine, qui a bon goût. Pendant la journée, nous mangeons occasionnellement un morceau de pain, qui est apporté de la maison. A 19h30, le travail est terminé, après quoi nous sommes ramenés au Lager dans les bus qui nous attendent. Vers huit ou neuf heures et demie, nous arrivons au Lager, après quoi le dîner est servi immédiatement. Ce repas se compose principalement de soupe, parfois de pommes de terre avec divers légumes et d'un morceau de viande occasionnel. Ensuite, on sert du café et du pain pour le lendemain, avec un morceau de saucisse ou de fromage à tartiner et du beurre (margarine).

Mercredi 9 avril 1941 au samedi 12 avril 1941 - Travail.

Dimanche 13 avril 1941 - Pâques. Messe du matin, puis petit déjeuner. Puis longue marche jusqu'à Pont-Christ, un village voisin, avec une jolie petite église. Promenade de l'après-midi à Landerneau, belle vieille ville, beaucoup de maisons négligées, pubs remplis d'étrangers, tous travaillant pour Todt [2].

Lundi 14 avril 1941 au samedi 19 avril 1941 - Travail comme d'habitude.

Dimanche 20 avril 1941 - Jour ouvrable. À 13 heures, j'apprends qu'une nouvelle entreprise cherche des gens, mais mon nom a été rayé. Après quelques recherches, il apparaît qu'il s'agit d'un malentendu, je vais donc directement à Brest, bonne réception, grand tonneau de bière et nous devons nous joindre à lui et boire un grand verre de bière. De la bière avait été spécialement envoyée de Dortmund. En conséquence, nous avons eu beaucoup de mal à attraper le dernier train pour La Roche.

Lundi 21 avril 1941 - Travail heureusement très différent. Avec la construction des ponts, il faut construire des quartiers d'habitation, etc. Dortmunder Union Brückenbau AG est mon patron maintenant.

Mercredi 30 avril 1941 - Travail comme d'habitude. Temps magnifique, malgré la pluie du matin. Le train a une heure de retard à La Roche.

Dimanche 11 mai 1941 - Déplacé dans un autre camp. L'endroit le plus proche s'appelle Penfeld. Bel environnement dans les bois. Nouvelle caserne, chambre pour 6 hommes, les jeunes sont venus avec moi de ma chambre précédente. En souvenir de La Roche, les commandants de salle devaient remplir une liste avec les noms des occupants, entre autres les nationalités. Dimanche 10 heures, remise des documents, en cas de négligence 5 marks d'amende. J'ai travaillé jusqu'à 5 heures et suis rentré à 6 heures au Lager. Après le dîner, visite du village.   . . . . .


[1] Lager = camp

[2] Afin d'organiser les gigantesques programmes de construction du "Troisième Reich", une organisation a été mise en place bien avant la guerre, basée sur des connaissances essentiellement militaires. L'organisation était dirigée par Fritz Todt. D'où le nom d'Organisation Todt (OT). L'Organisation Todt (OT) était un organisme gouvernemental qui laissait l'exécution aux petites et grandes entreprises de construction locales, qui étaient sous contrat avec l'OT. Les entreprises n'ont pas conclu ces contrats sous la contrainte, et en ont même tiré beaucoup d'argent. Par le biais de contrats, une sorte de gigantesque entreprise publique de construction a été créée, composée d'entrepreneurs, d'architectes, de constructeurs, de fournisseurs, etc. qui étaient tous sous contrat avec OT. Dans une phase ultérieure, comme OT ne disposait pas d'une "main-d'œuvre bon marché" suffisante pour achever les travaux de construction avant les dates fixées, il a fait appel à des travailleurs forcés étrangers, à des prisonniers de guerre et à des détenus des camps de concentration. En 1941 - l'année du journal de Cor W. Hogenhout - le nombre de personnes employées était déjà passé à 271.000. Au total, environ 35 à 40.000 Néerlandais ont été utilisés pour la construction du mur de l'Atlantique en Belgique et en France.

Cérémonie druidique... en 1987

Le dimanche 23/8/1987, la Confraternité Philosophique des Druides a choisi les bois du Pontois pour célébrer la cérémonie initiatique et l'accueil d'un nouveau membre.

Après l'assemblée générale de la société tenue dans la salle communale, la cinquantaine de membres s'est rassemblée dans le sous-bois du Pontois.

Devant le "Grand Druide", Pierre Manach, c'est un homme d'âge mûr qui a prêté serment de fidélité à la philosophie druidique. Portant vêture rituelle blanche, les membres des clairières ont chanté et prononcé des incantations en breton pour mettre en condition le novice. Dans le sous-bois a résonné le son de la trompe aux quatre points cardinaux. Le nouvel intronisé s'est recueilli devant Excalibur, l'épée du roi Arthur qui symbolise la vérité. "Cette initiation revêt un aspect mythologique mais surtout ésotérique", a expliqué une des femmes consacrées. Bien mystérieux que tout cela pour les non-initiés.

Dans le bois, cette cérémonie s'est déroulée à l'abri des regards voyeurs 1. "On nous considère comme des bêtes curieuses. Alors nous nous cachons".

La Confraternité Philosophique des Druides est née en 1974 d'une scission avec la Gorsedd 2, à cause de divergences idéologiques internes. Pour être druide, il faut appartenir à une nation celtique 3, avoir été membre de la section "Amis des Druides" pendant deux ans, faire constater par le Kuzul (conseil suprême) les efforts que l'on a fait pour accroître sa culture bretonne et celtique (en particulier la langue), être intègre et en harmonie avec la philosophie celte.

Si les Druides plongent dans leurs racines, ils se préoccupent aussi du présent (médecine homéopathique) ou de l'avenir (parapsychologie). "Notre pensée n'a rien de dogmatique. Nous ne serons jamais des passéistes parce que nous nous remettons en question de façon permanente".

Les femmes aussi : L'une des originalités de la Confraternité Philosophique des Druides est d'avoir rétabli l'ordre des femmes en son sein. Elles sont presque aussi nombreuses que les hommes et à égalité en droits et en devoirs. Pourtant leur intronisation fait l'objet d'une cérémonie différente.
(D'après le Télégramme du 24/8/87, Dominique Rivier)


1 Les propriétaires du bois eux-mêmes n'ont pas été autorisés à voir la cérémonie.
2 La Gorsedd de Bretagne, Goursez Vreizh en breton, de son nom complet Breudeuriezh Drouized, Barzhed hag Ovizion Breizh (en français : Fraternité des druides, bardes et ovates de Bretagne) est une association loi de 1901, créée en 1900 sur le modèle de la Gorsedd des bardes de l'île de Bretagne (Gorsedd Beirdd Ynys Prydain, en gallois). La décision de créer une Gorsedd en Bretagne sur le modèle gallois a été prise à Vannes en novembre 1899.
3 Il semble que cette condition n'existe plus aujourd'hui.

Articles de presse

Bois du Pontois. Histoire et trésors du manoir, le 9/6/2017 (Télégramme du 13/6)

 Vendredi, Christiane Abiven ouvrait les portes du manoir familial. La visite regorgeait d'histoires, notamment liée à l'occupation des Allemands, et d'anecdotes. Visite guidée à travers les siècles.

Vendredi, Christiane et son frère Jean-Paul Abiven ont fait visiter le manoir que leur arrière-grand-père avait acheté en 1913 et dans lequel ils sont nés. Le corps du logis a été construit au XVe siècle, ses ailes seraient de 1770. Les dépendances en schiste (écurie, étable, porcherie) ont été rénovées en 1990. Cette superbe bâtisse, au bord de la « Vieille route » qui mène à Landerneau, est en rénovation, attaquée par le mérule. Les travaux de restauration ont mis à jour un four à pain, dans un des murs.
Le château pendant la guerre Pendant la guerre, les Allemands ont occupé le château, devenu « bâtiment de guerre ». Le parc de 20 ha leur a permis de construire 20 baraques sur pilotis de 300 m² à la place de l'actuel sentier pédestre. « Il y avait plus de monde (700 à 800 personnes) dans le bois que dans la commune !, commente Christiane. Les bêtes étaient réquisitionnées, ainsi que les Rochoises, pour assurer les repas ». Joseph Abiven, son père, disait « que certaines avaient collaboré sentimentalement ».
La stèle de martyres Une stèle de martyres a été érigée pour rendre hommage à six jeunes résistants « victimes de la barbarie allemande », un 31 juillet 1944. Un ouvrier agricole de Pleyber-Christ de 62 ans repose également ici. Son attelage avait été réquisitionné et on ignore pourquoi il fut fusillé.
La chapelle À 100 m du manoir, se dressent les ruines d'une chapelle dédiée certainement au sieur Guillaume du Pontois. En 1941, les Allemands ont démoli la toiture pour y installer un mirador et surveiller la rade de Brest. On aperçoit deux grottes dans la roche : celle de Lourdes dédiée à la Vierge et l'autre dédiée à Sainte-Hélène. Sur des cartes postales, on aperçoit la Vierge et une belle sculpture de Sainte-Hélène, aujourd'hui disparue.
Julot, l'homme des bois Christiane fait découvrir la « cuisine » (pierre en surplomb, qui lui permettait de cuire sa viande) et plus loin « sa chambre », simple couche à l'abri. « Italien, Julot, surnommé " l'Homme des Bois ", était arrivé dans les années cinquante. Il vécut douze ans dans ce parc, même durant l'hiver 54, fort rigoureux. Féru de champignons, c'était sa source de revenus. » Marie-Louise et Christiane se souviennent de ce « géant très mince » qui leur faisait un peu peur... et « mangeaient des serpents ».
Trésors du patrimoine Cette promenade a permis aux Rochois de découvrir des trésors insoupçonnés du patrimoine mais aussi des arbres magnifiques voire « remarquables », dont le magnifique platane que Joseph Abiven admirait. Jean-Paul raconte que leur père avait abattu l'arbre le plus ancien. Son tronc faisait 1,23 m de diamètre ! Le Conservatoire botanique est venu admirer une fougère très rare et protégée (qui ressemble à de la mousse). Par temps sec, elle disparaît. Et Christiane avait bien révisé ses notes pour citer son nom : hyménophylle de Tunbridge. Claire Domergue.


Un article sur Joseph Abiven dans Le Paysan Breton de décembre 2008

X

Lundi à La Roche-Maurice, grande fête sportive (La Dépêche de Brest du 22/5/1942)

Le bourg si pittoresque de La Roche sera lundi le rendez-vous de tous les sportifs de Brest, Landerneau et environs, désireux à la fois d'effectuer une délicieuse promenade et de goûter un spectacle sportif de qualité réelle. C'est, en effet, avec le concours de la Milice Saint-Michel, de l'E.S. kerbonnaise, des Gâs d'Arvor et des équipes locales, que se fera l'inauguration du nouveau terrain de sport du Ponthois, situé en plein bois, dans un cadre merveilleux. Inutile d'insister sur la valeur de ces formations, qui doivent nous fournir une exhibition sensationnellle. Début de la fête à 14 h 30 précises, afin de permettre aux Brestois de reprendre le train du soir (18 h 55 Landerneau).

La Roche-Maurice - Grande kermesse (La Dépêche de Brest du 25/8/1942)

Une grande kermesse, au profit des prisonniers de guerre de la commune, aura lieu le dimanche 30 août, dans le beau cadre du bois du Pontois. Au programme : nombreuses loteries et tombolas dotées de lots importants : bicyclette, brouette, tissus pour manteaux, fauteuil rustique, lots d'épicerie, poupée bretonne.
Fête sportive. Attractions diverses. Théâtre de verdure : "La paix chez soi", comédie en un acte de Courteline, interprétée pat Mme et M. G. de Silguy ; chants et ballets bretons ; audition d'un remarquable trio de cors de chasse.
Buvettes, buffet, crêperies, comptoirs de pâtisserie fine, café-chocolat, fleurs et fruits, beurre et fromage, comptoir spécial de beaux lots qui seront vendus aux enchères.
L'ouverture de la kermesse se fera à 10 h. Les personnes qui désireront déjeuner au bois du Pontois sont assurées que le comité a fait le nécessaire pour leur donner satisfaction. A 19 heures : souper froid, orchestre. A 20 heures : tirage de la grande tombola. Tables de bridge.

La Roche-Maurice, grande manifestation de basket-ball (La Dépêche de Brest du 30/4/1943)

Afin de propager le basket-ball, le comité de l'U.S. Rochoise a fait appel pour dimanche prochain à des sociétés brestoises figurant au meilleur rang des équipes finistériennes. En raison de l'effort consenti, le comité invite les profanes à venir nombreux l'encourager, en assistant à cette fête sportive qui se déroulera dans le coquet cadre du bois du Ponthois, à 300 mètres du bourg.

La Roche-Maurice, le 22 août, grande fête de gymnastique (La Dépêche de Brest du 19/8/1943)

Une grande fête de gymnastique se déroulera dimanche 22 août, au bois du Ponthois. Pour cela le Comité a fait apppel à la Légion Saint-Pierre, société très cotée dans la région qui déplacera au grand complet tous ses gymnastes. Voici d'ailleurs un aperçu du programme : 15 h : défilé des gymnastes (du bourg au terrain du Ponthois) ; 15 h 15 : mouvements d'ensemble, mouvements libres ; 15 h 30 : exercices aux barres parallèles et à la barre fixe ; 16 h : pyramides ; 16 h 15 : courses comiques : 16 h 30 : tir à la corde, lever de la gueuse ; 16 h 45 : match de basket-ball avec le concours de l'E.S. Kerbonne. Le moniteur de la légion Saint-Pierre n'est autre que Joseph Juguet, notre sympathique champion de Bretagne du triple saut.

Sources des informations

ADB = Archives Départementales du Finistère à Brest
ADQ = Archives Départementales du Finistère à Quimper


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 André J. Croguennec - Page créée le 16/3/2019, mise à jour le 9/4/2023.