Pencran |
Si une bonne partie des terres de Pont-Christ dépendaient du fief du Brezal, ce n'était pas le cas pour toutes. D'autres étaient assujetties aux fiefs de Kerlorec, Kermadec ou Chef-du-Bois. En parcourant les archives de l'Ancien Régime, on trouve en effet :
Il semble bien que le "terroir de Gorrequer" faisait partie des fiefs sus-nommés, ce qui traduit un patch-work assez inattendu (de ma part en tout cas) dans le découpage des fiefs. En conséquence, en septembre 1788, on voit Michel et Marguerite Simon, frère et soeur, de Gorrequer qui exploitent une ferme à Pont-Christ, fournir :
- un aveu, au fief de Kermadec, pour la maison, crèche et jardin ;
- et un autre, au fief de Brezal, pour "un parc terre chaude nommé 'parc anneost' contenant 80 cordes, et la moitié d'une pièce de terre froide".
Notons aussi, mais dans un autre ordre d'idée , qu'au 16è siècle les Kersulguen possédaient des biens et des terres aux alentours de la chapelle Saint Antoine à Ploudiry, y compris la chapelle elle-même (voir en annexe); et, dans les années 1770, la demoiselle Françoise Olive de K/sulguen de K/lorec est propriétaire de Milin-Huz.
En effet, il y a une différence importante entre les "possessions" du seigneur et son "fief" (voir le chapitre "Possessions des seigneurs de Brezal"). Les possessions peuvent se trouver dans son fief ou dans le fief d'un autre seigneur. Fermer X
Pour montrer la volonté de puissance et d'extension des seigneurs de ces fiefs, rappelons l'épisode de la garde de la foire de La Martyre : "Cette garde avait toujours été commandée par le marquis de Brézal. Mais, lorsque Louis XIV eut établi des charges de syndic et de capitaine dans toutes les paroisses, M. de Kersulguen, seigneur de Kerlorec, se disant co-seigneur et prééminencier de la paroissse de Ploudiry, dont dépendait plusieurs trêves et notamment celle de La Martyre, acheta cet office avec le privilège de l'exercer et d'en disposer. Mais, ensuite il abandonna à Pencran et à La Martyre les droits et émoluments de la charge, cette charge devant être exercée par les fabriciens. Et finalement, le seigneur de Brezal continua de prendre et d'exercer le commandement du guet de la foire" (Michel de Mauny).
Ces noms de Kermadec, Kerlorec et Chef-du-Bois nous conduisent à Pencran où l'on trouve le manoir de Kermadec et le château de Chef-du-Bois (ou Penhoat ou Penancoët selon les sources). Essayons d'en savoir plus car nous aurons l'occasion de les retrouver en parlant des moulins de La Roche (vallée du Morbic).
Situation du château de Chef-du-Bois (Penhoat) et du manoir de Kermadec
Cadastre de Pencran : 3 P 157/1/5 - Section B 1 du Bourg - 1828
+ Cadastre de Landerneau (n° en noir) : 3 P 104/1/6 Section C 2 de la Ville - 1827
Au milieu de la parcelle n°3, on voit l'allée d'accès au château qu'on appelait "le mail de Kerlorec".
(*) La parcelle 64, parc ar candi, se trouve au sud de Loguellou, proche des zones humides (voir la carte IGN).
Le domaine de Chef-du-Bois ou de Penhoat se trouve à l'extrême ouest de la commune de Pencran.
L'entrée principale du château donnait sur la commune de Landerneau, paroisse de St-Thomas.
Une entrée secondaire existait sur l'avenue de Penhoat (parcelle n° 1 en haut du plan à gauche) entre les n° 2 et 13.
Le tableau des propriétés foncières du cadastre de 1828, indique comme propriétaire "M. de Lesguern à Chef du Bois", qui est aussi propriétaire d'un nombre impressionnant de terres et de propriétés bâties sur Pencran, et donne les précisions suivantes :
1 | L'avenue du Penhoat |
2 | Le bois de houx |
3 | Le pourpris de Chef du Bois. |
4 | Le château |
5 | La chapelle |
6 | Le jardin |
7 | Le verger |
8 | Le bout du verger |
64 | Parc ar candi (*) |
113 | Le manège (lande) |
118 | Parc quistin izella (sous futaie) |
119 | Parc quistin izella (T. Lab.) |
120 | Le jardin du garde (T. Lab) |
121 | Parc al leur (T. Lab.) |
122 | Parc al leur (semis) |
123 | Parc al leur (semis) |
124 | Parc an aerou (T. Lab.) |
130 | L'allée de charmilles (avenue) |
133 | Le champ du pigeonnier (T. Lab. |
134 | Le pigeonnier |
Histoire du château de Chef-du-Bois (Penhoat ou Penancoët) :
Le manoir du XIVe siècle était sans doute à l'image de Kermadec (voir plus bas), une cour fermée ceinturée de bâtiments, et il appartenait à la famille de Guérault, dont le blason portait d'azur à trois têtes d'aigle d'argent. De cette famille, on retient "Jean de Guérault (1350-1398) et qui fut abbé de Daoulas. 'Maître Guillaume', son frère et procureur, légua à l'abbaye tous ses livres" (source J.L. Deuffic).
Au XVe siècle, le manoir est propriété des Kerlozrec. Cette famille a son origine à Ploudalmezeau, ainsi que l'affirme Guy Le Borgne dans son Armorial breton : "KERLOZREC en Guitalmeze, évêché de Léon, pour armes antiques, voyez GARLAN, qui est le surnom ancien de Kerlozrec en Guitalmeze, Palé d'or & d'azur de 6 pièces". Il s'agit bien de notre famille, car le 18/7/1677, Jeanne de Kerguezec, veuve de François de K/sulguen (voir plus bas), fournira un "minu" au Roi pour "le manoir de K/lorec en la paroisse de Guitalmeze, etc...". On dit que la famille fut représentée à la croisade de 1248 par Hervé de Kerlozrec. En 1426, il existe à "Ploediry", dont on sait que Pencran est une trève, un noble appelé Jehan de Kerloreuc, qui possède les lieux de Lavallot et de Ru Lan. Est-il de la même famille ? En tout cas, en 1540, on trouve des aveux au roi, pour des terres à Ploudalmezeau, fournis par un Jean de Kerlorec, seigneur de Penancoët. "Le voyer féôdé de Landerneau était le seigneur de Kerlozrec, demeurant au manoir de Chef-du-Bois en Pencran. |
Les "preuves de noblesse" nous apprennent donc que Marguerite de Kerhoant était héritière, avant son mariage, de Kerlorec et de Chef du Bois.
Par le document préparatoire de ces "preuves de noblesse", on sait qu'elle le devint par le décès de Jean de Kerlozrec.
Au XVIe siècle, vers 1585, les Kersulguen héritent du manoir de Chef-du-Bois, ainsi que des biens à Kerlorec en Ploudalmezeau. Cet héritage est transmis grâce â Marguerite de K/coant (ou Kerhoent), qui avait épousé Gilles de Kersulguen. Nous le savons par l'arrêt rendu le 21/2/1671 par les commissaires de la réformation de la noblesse, que l'on trouvera en annexe. Il y est écrit à propos de Gilles de K/sulguen et de dame Marguerite de K/coant : "lequel surnom de K/coant est sorty de la maison de K/gournadech, et la dicte de K/coant devient héritière des maisons de K/lorec et de Penancoet, autrement Chef du Bois, laquelle maison de K/lorec portoit anciennement le nom de Le Moyne, et estoit des plus considérables du pays". Il y est dit aussi que Gilles de K/sulguen "espouza damoisselle de K/coant, dame de K/lorec et de Chef du Bois".
La branche de la famille de Kersulguen, qui nous intéresse ici, est celle des seigneurs de la Bouessière (ou Bouexière) à Ploujean près de Morlaix, ainsi qu'ils sont décrits dans l'Armorial breton de Guy Le Borgne : "Boessiere en Ploujan, evesché de Treguier, ancien surnom de cette maison, d'argent à six annelets d'azur 3.2. & 1, maintenant de K/sulguen. Un seigneur de cette maison se rendit si agréable à la Duchesse Anne, en qualité de l'un de ses gentilhommes ordinaires, qu'elle ne dédaigna pas de prendre son logement en ladite maison faisant une tournée par le pays". Cela se passair lors de son pèlerinage à Saint Jean du Doigt, en 1505.
Les descendants de Gilles de Kersulguen seront donc installés au manoir de Chef-du-Bois.
En 1662, François de Kersulguen se fait, alors, bâtir un château digne de son rang. Le Marquis de Kerlozrec s'adressa à l'architecte brestois Le Petit, élève de Mansart et de Le Nôtre, pour faire agrandir le château. Les projets de l'architecte, trop ambitieux et trop coûteux, ne reçurent qu'un début d'exécution : démolition de l'aile est, transformation du toit du logis en toit à la Mansart, et peut-être début d'exécution du jardin, dont subsiste un bassin.
Il est composé d'un corps central allongé, avec deux ailes transversales aux extrémités, et donne sur une cour rectangulaire. La porte principale est encadrée de deux colonnes doriques, surmontées d'un fronton arrondi. Dans le tympan on lit la date de la construction, les noms de Jésus, Marie, Joseph, Anna, et l'on voit deux écus, l'un portant les armes de Lesguern, l'autre les trois têtes d'aigle de la famille Guérault.
Aux Kersulguen succédèrent les Lesguern, issus de l'antique maison de Coëtménac'h. Leurs armes sont : Fascé de six pièces de vair et de gueules et leur devise : Soit. En effet, en 1753, Marie-Jeanne de Kersulguen épousa Joseph René de Lesguern.
En 1777, les Lesguern construisent la chapelle qui, avec les écuries et le vieux pigeonnier, complète l'ensemble des bâtiments actuels du Chef du Bois.
A la Révolution, la Marine réquisitionne les bâtiments pour y soigner des galeux.
En 1870, l'aile nord en mauvais état est démolie.
"A l'extrémité de la plus grande avenue, longue de 300 mètres, qu'on appelait jadis le "Mail de Kerlorec", on aperçoit au loin tout le cours de la rivière d'Elorn et dans le fond la rade de Brest. Encadré dans la sombre verdure des grands arbres, le paysage est d'une magnificence incroyable. A gauche, la côte rugueuse de Plougastel découpe ça et là des blocs superposés d'un fantastique étrange, à droite, de l'autre côté de l'eau, s'étendent les riants coteaux de Guipavas et de Kerhuon". (Bulletin de la Société académique de Brest, août 1880)
En 1925, le château devient propriété de la famille de Rosmorduc : Tanguy Le Gentil de Rosmorduc rachète le château de Chef-du-Bois ainsi que l'enclos paroissial. Son fils cèdera l'église à la municipalité mais gardera l'ossuaire et le jardin du presbytère. Aujourd'hui les propriétaires sont Olivier de Rosmorduc et ses enfants,
Après la seconde guerre mondiale, à la place de l'aile nord démolie, un bâtiment perpendiculaire au logis est édifié et habillé d'une série d'arcades, provenant de la destruction du cloître des Carmes à Brest.
Google-Earth : L'église de Pencran à droite, le château de Chef-du-Bois à gauche
A partir de Gilles de Kersulguen, on est dans la branche de Kerlorec qui réside au château de Chef-du-Bois.
NB. Les naissances et les décès qui sont localisés à St-Thomas par les registres doivent être compris comme étant intervenus au Château de Chef-du-Bois à Pencran.
Pour voir les liens avec la famille de Brezal, cliquer ICI Pour les effacer, cliquer LA
Les registres B.M.S. d'Hanvec pour cette époque n'ont pas été conservés. D'aucuns ont défini cet Hervé de Kersulguen comme fils de Jean et de Françoise du Chastel. Je n'ai pas fait ce choix, car je l'ai rattaché comme fils de Gilles et de Marguerite de K/coant :
Le comte Charles de Lesguern, maire de Pencran pendant 56 ans, fut révoqué de ses fonctions en janvier 1907 pour avoir replacé des crucifix dans les salles des écoles. Les électeurs de Pencran lui avaient témoigné leur fidélité en élisant comme maire pour lui succéder son fils Armand de Lesguern, qui par ailleurs était président de la Société d'horticulture et d'agriculture de l'arrondissement de Brest.
Le château de Chef-du-Bois et la chapelle à droite.
L'autre façade du château de Chef-du-Bois.
Comme la plupart des colombiers seigneuriaux (voir celui de Brezal), celui de Chef du Bois s'élève avec ses 8 mètres de haut à proximité du château, au milieu d'un champ. Son architecture ne diffère pas non plus des autres : schiste pour la structure extérieure, ronde, et le toit, formé de dalles organisées en gradins. A l'intérieur, les pierres de granit blanc disposées régulièrement sur des plaques d'ardoise, forment des boulins où nichent les pigeons, ici au nombre de 800, s'étageant sur 26 étages. Ceci le met dans la moyenne des colombiers de la région. Les murs font plus d'un mètre d'épaisseur, et il a une circonférence de 23 mètres. Il n'a aucune ouverture latérale, hormis une porte d'entrée étroite, s'ouvrant au nord-ouest vers le château, encadrée de pierres de Logonna... (source Pays de Landerneau Daoulas).
3 P 157/1/4 Section A 3 de Kermadec.
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Le manoir de Kermadec est situé dans un site occupé depuis l'époque gallo-romaine. Il a appartenu en 1270 , à Gérard Saladin, époux de Fuguette. Les Saladins blasonnaient D'or à trois annelets d'azur.
Leur fils, Olivier, prêtre est nommé recteur de l'Université de Paris en 1318, et reçoit le bonnet de docteur en théologie. Le 14 juillet 1340, il devient évêque de Nantes, en 1345, il publie des statuts synodaux (le sixième ordonne de dénoncer tous les dimanches les sorciers excommuniés). A la cérémonie de canonisation de Saint Yves, il prêche devant le pape Clément VI. Il fut "la fleur des prélats de son temps". Il meurt le 17 août 1354 à Nantes, où il est inhumé dans la cathédrale.
Le manoir fut donné à la soeur d'Olivier, Pigette, "Dame de Kermadec". En 1307, elle épousa Hervé Huon et apporta dans cette maison, issu d'un cadet des anciens vicomtes de Léon, la terre de Kermadec.
Ces dates de 1270 et de 1307 apparaissent dans un aveu de Messire François de K/sulguen fourni à la duchesse de Rohan en 1666, donc après son acquisition de Kermadec. On y lit la phrase suivante : "les mannoirs de K/madec et de K/matgeffroye (Keranjaffres) avec leurs dépendances, ainsy qu'ils seront ci-après describés, sont exempts de rachat par don et concession en faite par hault et puissant messire Hervé de Léon, seigneur de Léon, Sizun et Ploudiry, aux seigneur et dame de K/madec au mois de janvier 1270, quel don et exemptions ont été confirmés par haults et puissans Guyomarch et Conan de Léon par lestres dabtés du mois de febvrier 1307, les surplus des autres hérittages cy-après subjects audit rachapt." (AML 9 S 56) Fermer X
Les années passent, le manoir et le domaine de Kermadec sont victimes d'un manque d'entretien et frappés de vétusté. Le 26 juin 1450, ils sont dits "estre ruyneux, indigents de plusieurs reparacions". Pierre de Coatquelven, beau-père et tuteur d'Yvon Huon de Kermadec, réunit le conseil de famille pour décider "de réparer, closre et réédifier lesdits manoirs, hostels, boys, terres et autres héritages" . Le manoir sera donc réédifié dans sa forme actuelle.
Cf dans Les Cahiers de Dourdon N° 13, le manuscrit du 26 juin 1450, qui est une autorisation donnée à Pierre Coatquelfen, tuteur de Yvon Huon, mineur, de réédifier le manoir de Kermadec, et aussi la transcription et le commentaire qu'en a fait Jean Kerhervé. X
Il est conçu selon les dispositions traditonnelles des manoirs de cette époque dans le Léon. Il se compose d'un corps de logis en équerre donnant sur une cour autrefois fermée. De style gothique, il est bâti en schiste du pays avec les entourages de baies en granit de Kersaint sur un modèle du XVe siècle. Le manoir est flanqué, au retour d'équerre de ses deux bâtiments, d'une tour hexagonale découronnée au pied de laquelle s'ouvre un portail décoré d'une arcature à crossette et que flanque une tourelle ronde. La tour subsiste encore partiellement aujourd'hui avec son grand escalier en granit qui, sur le palier du premier étage, s'épanouit en une majestueuse rotonde dont la voûte et soutenue en son milieu par une gracieuse colonne monolithe.
A l'intérieur, au rez-de-chaussée, trois pièces principales sont réparties, autour d'un escalier à vis permettant d'accéder à l'étage et aux combles. La plupart des salles sont de grandes dimensions et comportent des cheminées monumentales. La grande salle a conservé ses poutres peintes et joliment décorées.
L'écusson, qui surmontait le portail extérieur, portait les armes des Huon D'or à trois croisettes d'azur accompagnées de trois annelets de même, sur un écu incliné, timbré d'un heaume à lambrequins et soutenu par deux lions.
Les Kermadec, prévôts de Landerneau : La 'provosté d'environ Landerneau dont François, sieur de Leheuc et Pierre Huon, sieur de Kermadec sont provostz féaudez et alternatifs' (1520 ). Elle apparaît encore en 1549 et en 1571. En 1641, elle est dite : 'la provosté antienne de Landerneau de laquelle les sieurs du Lehec et de Kermadec sont provostz féodés et alternatifs' (cf Kernevez-Le Roy").
En 1654, Alain Huon de Kermadec épouse Anne de Pensornou, dame de Trogoff, qui habitait le manoir que son père venait de construire à Plouegat-Moysan. Elle apporte le manoir en dot. Alain change de résidence et va habiter chez son épouse, on le constate par le lieu de naissance de ses enfants (voir plus bas).
Mais la possession de Trogoff lui ayant été contestée, il s'ensuivit un procès qui le ruina complètement et l'obligea à vendre ses terres de Kermadec et de Trogoff.
En 1663, le manoir de Kermadec est donc racheté par Joseph de Kersulguen, seigneur de Chef du Bois. Les descendants de Kersulguen en restent propriétaires jusqu'en 1986, et louent le manoir et les terres à des agriculteurs.
En 1948, Le Télégramme faisait cette description du manoir : "... Le manoir est frappé d'une irrémédiable décrépitude. Aucun couvreur ne veut plus monter sur le toit du manoir, tellement c'est dangereux et décevant, car, pour une nouvelle ardoise posée, trois anciennes dégringolent ou s'effrondent.
Pendant la belle saison, le séjour y est supportable. Mais en hiver, c'est tout autre chose, la lutte contre la pluie, le vent et le frod y devenant, avec le temps, de plus en plus difficile. Là vit pourtant une nombreuse famille de travailleurs acharnés, les Jaffredou de Kermadec, ainsi nommés pour les différencier des autres portant le même nom. Et cette noblesse paysanne, fidèle à la terre envers et contre tout, a bien aussi ses mérites.
La ferme de Kermadec comporte près de 50 hectares, dont la moitié à peine est actuellement cultivée, faute de main d'oeuvre et de matériel moderne, frappant exemple de ce qui manque à l'agriculture française pour rattraper l'avance de certains pays étrangers. Il y faudrait des millions. Et ce n'est pas chez nos fermiers qu'on les trouvera. Ceux de Kermadec ont pourtant acheté un tracteur. Mais une infinité d'autres choses leur manquent pour exploiter rationnellement le domaine et en tirer le maximum. Qu'on mette au moins à leur disposition un logis habitable ! Certes,il font de leur mieux et sont même des novateurs en ce qui concerne notamment la pomme de terre sélectionnée et le fraisier. Car la terre de Kermadec, judicieusement engraissée et travaillée, convient admirablement à ces deux cultures.
Photo :Philippe Huon de Kermadec fait visiter son manoir lors des journées du patrimoine
en septembre 2015 (source Le Télégramme).
Au seuil de l'entrée du manoir de Kermadec, l'attention du visiteur est retenue par une niche comportant une très originale statue en granit, sorte de moine barbu, portant sur son sein, en relief, la reproduction d'un fouillis de viscères. C'est, nous dit-on, Saint Mémoir, tout ce qui reste de l'antique chapelle du manoir, depuis longtemps démolie. Saint Mémoir est surtout invoqué pour la guérison des coliques et autres maux de ventre. Au bas de la statue est inscrite la date de 1567. O, vénérable personnage, tout saint qu'il soit, n'en est pas moins assez vindicatif. Et il ne fait pas bon lui manquer de respect. A preuve, cette anecdote que l'on raconte à son sujet : Il y a une soixantaine d'années, les ménagers de Kermadec étaient en train de préparer des pommes de terre pour le repas du soir, quand survint un irrévérencieux jeune homme, qui se mit étourdiment à se moquer du saint. Et, joignant le geste à la parole, il lui lança une pomme de terre à la figure. Mal en prit à l'auteur de ce sacrilège, qui fut aussitôt pris de terribles coliques, dont il ne fut délivré qu'après avoir fait brûler un cierge au pied du saint". (Télégramme du 4/8/1948)
En 1986, Philippe Huon de Kermadec, descendant d'Alain, rachète le manoir et entreprend de le restaurer. Il a été dégagé des constructions agricoles parasites qui le défiguraient et a retrouvé ainsi tout son intérêt, d'autant plus que l'intérieur a conservé ses dispositions d'origine.
Kermadec a changé de maîtres pendant 3 siècles, mais la famille Huon de Kermadec, très distinguée au cours des derniers siècles dans l'armée et la marine, est revenue au bercail, fidèle à son antique devise en langue bretonne : Atao da virviken.
"Kermadec, berceau de la famille Huon, que la tradition rapporte être issue en ramage des anciens vicomtes de Léon. Hervé Huon, le plus ancien de ses membres connus, marié à Pigette Saladin, s'attacha à la personne d'Hervé de Léon, qui l'établit, à la fin du 13è siècle, prévôt féodé héréditaire dans toutes les dépendances de sa vicomté, et, par ses lettres de 1307, confirma, au profit du même Hervé Huon et de ses descendants, les lettres d'exemption de rachat du fief de Kermadec, octroyées en 1270, par Guyomarc'h de Léon, à messire Saladin, père de la dame de Kermadec. - Guyomarc'h Huon faisait partie de la compagnie du sire de Léon, sous le commandement d'Olivier de Clisson, au siège du château de Brest, occupé par les Anglais, en 1378. - Olivier Huon, sieur de Kermadec, écuyer du corps et de la chambre du duc de Bretagne, Jean V, l'accompagna jusqu'à Amiens, pour secourir les Français à la bataille d'Azincourt, en 1415. - Hervé Huon, après avoir embrassé, à la fin du 16è siècle, le parti de l'Union, signait en 1594, entre les mains du lieutenant-général Sourdeac, la capitulation des ligueurs du Léon avec Henri IV".
(Prosper Levot)
Alain : Né à Kermadec, il fut baptisé à Pencran le 18 mai 1629. Il servit comme volontaire dans la compagnie de gens d'armes du prince de Conti en 1648, prit part aux campagnes de Catalogne en 1655 et du Piémont en 1657. Reçu chevalier de Saint Michel en 1649 (ordre créé par Louis XI en 1469 : croix d'or à 4 branches anglées par des fleurs de lys), il fut maintenu écuyer et chevalier d'ancienne extraction par arrêt du 18 juillet 1669.
Deux de ses fils furent tués en même temps, à la prise de Carthagène en Amérique, autrefois port important de la Colombie, dans l'expédition du baron de Pontis.
Vincent devint capitaine de vaisseau et chevalier de Saint Louis. Il laissa postérité qui se perpétua jusqu'à nos jours dans les Huon de Kermadec actuels.
Du 21ème feuvrier 1671 arrest de nos seigneurs les commissaires establys en la chambre des nobles au parlement de Rennes pour la réforme de la noblaisse de la provinsse de Bretagne par lequel les seigneurs de K/lorec portant le surnom de K/sulguen sont desclarés estre d'anssienne extraction noble.
XXI feb. 1671
Extraict des regestres de la chambre establye par le Roy pour la réformation de la noblesse du pays et duché de Bretagne par lettres pattantes de sa maiesté du mois de janvier 1668 veriffyées en parlement le 30 juin en suivant.
Entre le procureur général du Roy demendeur d'une part, et messire François de K/sulguen, chevalier, sieur de K/lorec, Chef du Bois et autres lieux, demeurant en son mannoir de Chef du Bois, paroisse de Sainct Thomas, évêché de Cornouaille, ressort de Quimper Corentin, faisant tant pour luy que pour Messieurs Joseph Hyacinthe de K/sulguen, son fils aisné & Mathurin de K/sulguen, son fils puisné, et Charles de K/sulguen, sieur de K/eleer, Le Pruguer & demeurant d'ordinaire au mannoir de Pratanlan, paroisse de Plouyder, evesché de Léon, ressort de Lesneven, deffendeurs, d'autre part,
Veu par la dicte chambre, deux présentations, la première du 26è mars 1669 faites par le dict sieur de K/lorec, tant pour luy, que pour ses dicts enfents au soustien des qualités d'escuyer et de chevalier comme estants issus d'ancienne chevalerie, et extraction noble, porter pour armes un écartelé du premier et du quatriesme d'or au lion de gueulles, armé, couronné et lampassé d'azur, cantonné d'un escartelé d'or et de gueulles, et au deuxiesme et troisiesme, pallé d'or et d'azur de six pièces qui sont les armes de K/lorec,
et la deuxiesme est du 30è mars 1669 par le dict sieur de K/eleer au soustien des qualités de noble et d'escuyer, comme issu juveigneur de la maison de K/lorec, sittuée en la paroisse de Guitelmezeau dict évesché de Léon, et se joindre audit seigneur de K/lorec, deffendeur tant pour luy que pour ses dicts enfants soubs le signe de maistre Pierre Breal, son procureur, signiffiée au procureur général du Roy le 7è avril 1669 par laquelle il soustient les qualités de messire et de chevalier, et comme tels ils soyent inscriptes au roole des nobles du siège presidial de Quimper Corentin, soubz lequel la maison de Chef du Bois, autrement Penancoet, en laquelle il faict sa résidence, evesché de Cornouaille, est sittuée.
Et à cet effet articule qu'il tire son origine de Prigent de K/sulguen et de Tiphaine de La Bouessiere, qui vivoit au siècle 1400, desquels isoirent quatre enfants, Guyon mort sans enfants, Tanguy, Marie et Janne de K/sulguen ;
Dudict Tanguy et de Constance Le Voyer, sieur et dame de La Bouessiere, descendirent autre Guyon de K/sulguen qui ne laissa de postérité, et Jan de K/sulguen qui fut marié à damoiselle Béatrice de K/amborgne, aussy sieur et dame de La Bouessière, qui eurent pour enfents Pierre, Guillaume et Catherine ;
Dudict Pierre leur frère aisné principal et noble, et damoiselle Margueritte du Poirier, descendirent plusieurs enfents, sçavoir entre autres Jan, Gilles, François, Pierre de K/sulguen, deuxième du nom, et filles ;
Dudict Jan aisné principal et noble s'est faict la branche de messire Jan de K/sulguen, sieur de La Bouessière, qui représente auiourd'huy le chef de la famille, que le dit Gilles, premier frère puisné dudit Jan, enfents dudict Pierre, et ladite Du Poirier, espouza damoisselle de K/coant, dame de K/lorec et de Chef du Bois, dont issurent autre Jan deuxiesme, et Hervé de K/sulguen ;
Dudit Jan, fils aisné principal et noble, et de damoiselle Françoise du Chastel, autre Jan troisiesme, Anne de K/sulguen et autres filles ;
Dudict Jan et de damoiselle Gabrielle Le Ny isoirent encore trois enfants, ledit François de K/sulguen, sieur de K/lorec, Hervé mort sans enfants, sénéchal de Landerneau, et Charles de K/sulguen, sieur de K/eleer ;
Du dit François et de damoiselle Janne de K/guezec, héritière du Carpont, sont issus lesdicts Joseph Hyacinthe, Mathurin et Louyse de K/sulguen, mariée à Pierre de K/lech, sieur du Rusquet,
et pour preuves de cette genealogye, et pour faire voir qu'il est issu puisné de la maison de la Bouessière, le partage noble faict entre le deffendeur, Hervé et Charles, sieur de K/eleer aussy deffendeur, damoiselles Anne, Françoise et Marguerite de K/sulguen, ses frères et soeurs, entre lesquels fust fait partage, provision, etc de la succession dudict Jan de K/sulguen, leur père, le 7è octobre 1644, dans lequel il est recogneu que ladicte succession est noble et advantageuse, ainsy qu'entre personnes nobles, dont le lieu de K/gornec Huelaff fust baillé audict Hervé de K/sulguen, sénéchal de Landerneau, la succession duquel fut recueillye collatéralement par ledict sieur de K/lorec, defendeur, suivant leur partage quy se montoit pour chaqun des puisnés à la somme de 413 livres, et l'estat des sommes touchées par les compartageants en datte du 22è décembre 1655.
Le décret de mariage du 28è novembre 1608, dans lequel nobles hommes René de K/sulguen , sieur de K/goff, curateur dudit Jan de K/sulguen ; escuyer Charles de K/sulguen, sieur de Pratguen ; escuyer François de K/sulguen, sieur de Traouesden ; noble homme François Penfeunteunyo, sieur de la Villeneuffve parents paternels et nobles et puissant Sébastien de Ploeuc, seigneur dudict lieu ; noble et puissant Vincent du Chastel, sieur de Mesle, noble et puissant Claude de K/ouartz, noble homme Claude de Ploeuc, sieur de Coetquenan ont donné leurs suffrages comme parents dudict sieur de K/sulguen,
et du cotté maternel de la dicte Le Ny les seigneurs de Recerus, K/amborgne et de K/ouartz, K/gornadech et autres y desnommés qui recoignoissent ledict sieur de K/lorec, deffendeur, estre gentilhomme d'honneur et de mérite et issus de noble extraction et bonne et ancienne maison, et sur leurs advis le dict decret de mariage dudit Jan avec la dicte Le Ny auroit esté conclud.
Ce "René de K/sulguen, sieur de K/goff, curateur dudit Jan..." s'appelle en réalité "Hervé". Il apparaît sous ce dernier prénom dans le brouillon qui a servi de document préparatoire aux preuves de noblesse. C'est sous le prénom d'Hervé qu'on le voit dans les décrets et contrat de mariage de Jan de Kersulguen et de Gabrielle Le Ny, ainsi que dans les partages réalisés par Jean avec ses soeurs, alors qu'il était encore mineur. On retrouvera, en 1615, pour une affaire cocernant des biens à la Villeneuve en l'Hôpital-Camfrout, "Hervé de Kersulguen, mary ou procureur de droict de damoiselle Marguerite de K/liver, sa compaigne, sieur et dame de K/goff, K/ochant, etc résidant audit lieu de K/ochant, paroisse de Hanffvec". Fermer X
Sur le degré du dict Jan de K/sulguen, père des defendeurs audict Jan deuxiesme du nom leur ayeul se justiffye par six actes :
Le premier est le contrat de mariage du 27è octobre 1582, passé entre noble homme Jan de K/sulguen, seigneur de K/lorec, et damoiselle Françoise du Chastel, seconde fille de noble et puissant Anthoine du Chastel et damoiselle Marie Lescauff, sa femme,
Le second est la déclaration de maiorité du dict Jan de K/sulguen, fils aisné principal et noble de haut et puissant Jan de K/sulguen deuxiesme, et de la ditte du Chastel par l'advis des sieurs de K/goff son oncle, des sieurs de K/ouats, K/lech, K/sainctgily, K/babu, Penandreff et autres du consentement desquels il est à voir dans l'administration de ses biens, ayant atteint l'âge de 20 ans comme personne noble,
Les trois, quatre et cinq sont les partages donnés par Jan de K/sulguen à damoiselles Anne, Catherine et Julienne de K/sulguen ses soeurs aux successions dudict Jan second et de la dicte du Chastel, leur père et mère, dans lesquels le gouvernement noble et advantageux est recognu datté du 25è d'avril 1609,
Et la sixiesme est le contrat de mariage de Françoise de K/sulguen avec noble et puissant Allain de K/loaguen, sieur de Crecheuzen du 18è juin 1600
Les degrés dudict Jan deuxiesme du nom fils de Gilles de K/sulguen et de dame Marguerite de K/coant se justifie par actes, lequel surnom de K/coant est sorty de la maison de K/gournadech, et la dicte de K/coant devient héritière des maisons de K/lorec et de Penancoet, autrement Chef du Bois, laquelle maison de K/lorec portoit anciennement le nom de Le Moyne, et estoit des plus considérables du pays,
Le premier desdicts actes est l'adveu présenté au Roy par ledict Jan deuxiesme du nom le 10è juin 1603 comme héritiere principale et noble de la dicte Marguerite de K/coant et l'hommage faict à la chambre des comptes le 17è desdicts mois et an,
La deuxiesme est l'acte de transport du 25è janvier 1581 des héritages que mademoiselle Anne du Liscoet tenait en douaire de ladicte maison de K/lorec, qui estoit la terre de Penancoet avec ses appartenances
et la dernière desdicts actes est la transaction du 23è avril 1585 entre le dict Jan et Pierre du Liscoet, grand-père de madame la baronne de Nevet d'à présent et second mary de la dicte de K/coant et les testaments de la dicte de K/coant dans lequel elle déclare vouloir estre enterrée en la chapelle de Sainct Jan Baptiste et en la cathédrale de Léon ou avoit esté inhumé Gilles de K/sulguen, sieur de K/goff son premier mary, et que les pleds portés par iceluy soient exécutés du consentement de noble homme Jan de K/sulguen, son hoir principal,
Transaction du 5è janvier 1558 entre nobles gents Ollivier de Brezal et noble gens Gilles de K/sulguen et la dicte de K/coant, sieur et dame de K/goff, au subiect des préminences en la chapelle de Sainct Yellaer,
Contract de mariage de damoiselle Anne de K/sulguen, fille de Gilles de K/sulguen et de Marguerite de K/coant du 25è janvier 1581. Ce partage donne à ladicte Anne le 28è juin 1586, les transactions du 17è septembre 1587 passées entre escuyer Hervé de K/sulguen, sieur de K/goff, puisné, et noble homme Jan de K/sulguen, sieur de K/lorec, son frère aisné principal et noble, dans lequel il est recogneu qu'ils sont issus puisnés de la maison de La Bouessière, et que leur feu père n'auroit esté partage que dans un tiers pour tous les puisnés, et que plusieurs chevalliers de leur nom auroient sorty desdictes maisons de La Bouessière et K/lorec et Penancoet. Lequel acte ayant esté entreprins par lettres du 11è août 1607, et se fonde sur ce que le dict partage et assiette n'estoit entière, mais toutefois demeurant d'accord du gouvernement noble et advantageux pour l'aisné, et enfin transigerent le 20 avril 1609, et fust donné quelques hérittages en supplément ratiffiant et corroborant la transaction du 17è septembre 1587.
La preuve que le dict Gilles estoit frère puisné d'entre Jan de K/sulguen, sieur de La Bouessière, enfent de Pierre et de Margueritte du Poirier, se tire de l'acte du pénultième may 1556 suivi d'une prinse de possession du 6è juin audit an, parce que par iceluy noble homme Jan de K/sulguen, sieur de Controat, baille à noble homme Gilles de K/sulguen, son frère juveigneur, une moittyé du convenant affermé à Parorval. Ce fust en assiette, et à valloir au droict advenant et naturel dudict Gilles en la succession de damoiselle Margueritte du Poirier, autrement Bougoat, leur mère, & réservée la ligeance comme juveigneur à aisné et outre plus à valloir en la succession future dudict sieur de La Bouessière, leur père, estant le dict Gilles receu à homme par le dict Jan de La Bouessière, son frère aisné, lequel Pierre, leur père, est marqué au rang des nobles de la réformation de 1535 et comparu aux montres de 1480 suyvant l'extaict de la Chambre déclaré le 11è de janvier 1669 et il s'apprend par l'extraict de réformation que ledict Pierre de K/sulguen est qualiffyé le seigneur de Beuzit, et par le roolle des montres de l'an 1533 ledict Pierre est appellé seigneur de La Bouessière, sy bien qu'il est constant que Beusit et La Bouessière est mesme chose, et cette verite se confirme encore par la ferme du 14è septembre 1643, par laquelle Missire Yves Le Roux, prestre, est qualiffyé viquaire de La Bouessière, autrement Beusit, et il est sy vray que le changement du nom est si commun en Basse-Bretaigne, que les autheurs des deffendeurs estoient quelque fois qualiffyés seigneurs de Penancoet, et quelques fois seigneurs de Cheff du Bois, quy est une terre sittuée près la ville de Landerneau, proche l'église et trève de Pencran. Ce quy s'apprend par le procès-verbal des marques d'honneur en ladicte églize comme dépendant de la terre de Penancoet, autrement Cheff du Bois, des 12 et 13 febvrier 1624, et par l'aveu du 10è décembre 1571 présenté au Roy par noble Pierre du Liscoet, seigneur de K/gorlay, second mary de Margueritte K/coant. Au surplus des degrés cy-devant articulés, il se voit par les tiltres qu'a produit le sieur de La Bouessière, cheff de la famille, et que les encêtres des deffendeurs soient issus d'un juveigneur de l'illustre famille des seigneurs de Pont-l'Abbé, quy sont des marques authentiques que leur famille est une ancienne chevallerye dont tous leurs ancestres ont esté qualiffies haults et puissants seigneurs et contracté mariage avecque des filles de haultes et éminentes qualités.
Induction dudit Charles de K/sulguen, sieur de K/eleer, deffendeur soubz le sign de Maistre Guy Le Basere, son procureur, fournye au procureur général du Roy par Testart, huissier en la cour, le 13è avril 1669, pour en conséquence des susfctes actes induicts par le sieur de K/lorec son frère aisné estre maintenu en la qualité d'escuyer d'extraction noble et employé au cathalogue des gentils hommes de Lesneven pour jouir des prerogatives de noblesse ainsy que leurs prédecesseurs. Lequel sieur de K/lorec l'auroit recognü pour son frère puisné et consenty sa jonction suyvant l'arrest de la chambre du 10è avril 1669, et il s'apprend, par l'extraict de baptesme du 27è octobre 1630, que ledict sieur de K/eleer est fils puisné de Messire Jan de K/sulguen et Dame Gabrielle Le Ny, sieur et Dame de K/lorec. C'est tout ce que par lesdictes partyes a esté mis et produict pardevers la dicte chambre au désir des leurs inductions.
Conclusion du procureur général du Roy consideré, la chambre faisant droit sur les instences, a déclaré et déclare les dicts François, Joseph Hiacynthe, Mathurin et Charles de K/sulguen nobles, et issus d'ancienne extraction noble, et comme tels leur a promis et a leurs descendants en mariage légitime de prendre la qualité d'escuyer, et les a maintenu au droict d'avoir armes et escussons timbres apartenants à leur qualité, ey à jouir de tous droicts, franchises, preminences & privilèges attribués aux nobles de cette province, et ordonne que les noms des dicts François, Joseph Hyacynthe et Mathurin de K/sulguen seront employés au roolle et cathalogue des nobles de la sénéchaussée de Quimpercorentin et le dict Charles de K/sulguen en la juridiction royalle de Lesneven. Faict en la dicte chambre à Rennes, le 21è jour de febvrier 1671.
Jean de Kersulguen décède en 1604, laissant cinq héritiers : Jean, fils ainé, "héritier principal et noble", époux de Jeanne Le Ny, et ses quatre soeurs : Anne, épouse de Prigent de Kerlec'h ; Françoise, épouse d'Alain de Kerloaguen ; Catherine, épouse de Guillaume Mol et Julienne, épouse de Christophe de Guernisac.
En 1609, Jean le fils aîné, encore mineur, il n'a pas 25 ans révolus, organise le partage de la succession, avec l'assistance de son curateur Hervé de Kersulguen et sur l'avis de Bizien de Kersaintgilly, ses oncles. On est dans le cas d'un "partage noble", soit 2/3 pour le fils ainé et 1/3 pour les autres enfants.
Le partage réalisé pour Catherine nous intéresse plus particulièrement car il concerne des biens à Ploudiry et notamment autour de la chapelle Saint Antoine, située à Pen-an-Fers. On comprend ainsi pourquoi le calvaire de cette chapelle porte les armes de la famille Mol, qui résidait pourtant au château de Kerjan-Mol à Trebabu. Donc assez loin du sud-est de Ploudiry.
Ce partage nous permet, également, de confirmer l'existence d'une chapelle à cet endroit avant le 17è siècle.
Noble et puissant Jean de K/sulguen, sieur de K/lozrec, Penanchoat, etc, demeurant en son dict manoir de Penanchoat en la parroisse de Sainct Thomas les Landerneau, n'ayant encore 25 ans complets, authorisé de nobles homes, Herve de K/sulguen, sieur de Kergoff, son oncle et curateur, et par l'advis d'escuyer Bizian K/sainctgilly, sieur de K/menguy, aussy son oncle, faisant son partage à damoiselle Catherine de K/sulguen, sa soeur, femme et espouze de noble homme Guillaume Mol, sieur de K/jan, pour laquelle absente sondit sieur Mary, demeurant en sondict manoir de K/jan en la parroisse de Trebabu, stipulle et accepte ledit partage pour sa part et légitime portion des successions héritières et mobilières de deffuncts nobles et puissants Jan de K/sulguen et Françoise du Chastel, sa compagne, vivants sieur et dame desdits lieux de K/lozrec, Penanchoat, etc, leur père et mère, après avoir calculé le revenu annuel desdictes successions imobilières sur le gros et rantier apparu et fourny par ledict sieur de K/lozrec et reconnait l'un envers l'autre lesdites successions estre nobles et de noble gouvernement et devoir estre partagées aux deux parts pour ledit sieur de K/lozrec aisné et tiers pour ses soeurs, qui sont au nombre de quatre, a esté trouvé l'afférant de ladite dame de K/jan qui est une quatriesme partye audit tiers monter à la somme de 600 livres tournois de revenu annuel en assiette de ladite somme ledit sieur de K/lozrec a baillé, céddé et transporté et délaissé à ladite dame de K/jan les héritages, droits héritiers et preminances qui s'ensuivent, sçavoir :
MOL
D'argent à trois ancres
de sable, deux en cheff
et une en pointe
En la parroisse de Ploudiry
Le manoir et lieu noble de Penanferts avec la chapelle, bois de haut futaye et de décoration et autre, les issues et appartenances avec les terres qui en despendent tenues en ferme par Yvon Caro pour en payer par chacun an au terme de la Sainct-Michel en septembre la somme de 72 livres,
Le bois tailliff appellé "Taill Penanferts" pour 23 livrs 7 sols de rente, le moulin pour 36 livres ainsy qu'il est tenu par Yvon Detourt (?),
ITEM le manoir et lieu noble de Ruautan, tenu par Jan Maudir et consorts pour 84 livres, le bois tailliff appellé "Tail Ruautan" pour 45 livres 7 sols de rente l'an,
PLUS le lieu et convenant appellé K/lan tenu par François Le Bris et Françoise Maudir pour 24 livres au mesme village de K/lan, autre convenant tenu par lesdits Bris et Maudir à domaine congéable à l'usement de Treguier pour payer 4 livres 19 sols 7 deniers par an.
Le convenant appellé K/ana tenu en ferme par Herve Le Guen pour en payer l'an 54 livres et 2 bouesseaux avoine mesure de Landerneau vallant 24 sols à l'apprecy, convenu entre ledict sieur de K/lozrec et ledict sieur de K/jan et autres juveigneurs.
Plus le convenant dépendant que tient en ferme Yvon Bras pour 22 livres 16 sols et 2 bouesseaux avoine, prédicte mesure de Landerneau.
Le lieu et convenant du Richou tenu par Jacques Paugam pour 108 livres
Le convenant de Pouldicguy tenu par Jean K/riou pour en payer 54 livres,
Autre convenant appellé K/denez tenu par Yvon André pour 15 livres
Et le convenant tenu par Guillaume Paugam et Yvon Le Maubien cy appellé Lesmanach pour payer par chacun 30 livres 4 bouesseaux froment vallants suivant l'apprecy 8 livres, 4 bouesseaux seigle, vallants 100 sols, et 8 bouesseaux avoine vallants 4 livres 16 sols, 6 chapons 30 sols, et un mouton pour 40 sols.
Tous lesdits héritages scitués en ladicte parroisse de Ploudiry, tenus en fief de la cour de Landerneau quitte de charge.
Item la somme de 60 sols de rente ou cheffrente deube pour les héritages de Herve Le Guen dessus
. . [deux lignes blanches sur la feuille] . .
situés en la paroisse de Crouzon et 10 sols tournois de cheffrente deubs par Allain K/doncuff dessus deux parcs appelés "Douar Guerault" situés en la paroisse de Dirinon, tout ledit revenu montant ensemble, sauf erreur de calcul, à la somme de 600 livres et 3 sols par chacun an que lesdits sieur et dame de K/jan et leurs héritiers tiendront dudict sieur de K/lozrec en fief de ramage comme juveigneur à aisné et en reconnaissance luy payeront à chacun jour de feste des Rois en janvier 3 jours de cheffrantes ou rante ramagère. Lesquels héritages et droicts héritiers lesdits sieur et dame de K/jan jouiront au terme de la St Michel en septembre prochain venant et cependant en pouront prendre la parc.. actuelle, réelle et corporelle soit en présence ou absence dudict sieur de K/lozrec, lequel s'oblige au garantage de ce que dessus, et pour le regard de ladite succession mobilière après avoir procédé au calcul des biens meubles, raporté en l'inventaire qui en fut faict aptès le décès dudict deffunct sieur de K/lozrec le 21è jour de décembre 1604 et du mémoire et estat de la recepte des restaux faict par ledict sieur de K/lozrec et des deniers qu'il auroit receus de la vente des bois taillis mentionnés et raportés au gros de rentier les diminutions et graces faictes audit sieur de K/lozrec par le seigneur de fiefs sur le payment du rachapt de son deffuncr père et de toutes autres choses répputtées pour meubles ayant aussy calculé les arrérages de 4 ans desdits 600 livres, pour ce que lesdits sieurs et dame de K/jan n'en auroient jouy, après avoir aussy desduict les jouissances qu'ils en auroient faictes et les accoustrements argent et autres commodités par ledit sieur de K/lozrec fournis à la dame de K/jan, sa coeur, au desir des mémoires biens et quittances qu'il a présentement apparus de rendre audit sieur de K/jan a esté trouvé ledit sieur de K/lozrec estre redevant auxdits sieur et dame de K/jan en la somme de 1.348 livres 17 sols et 6 deniers valloir en laquelle somme ledit sieur de K/lozrec a baillé et transporté auxdits sieur et dame de K/jan sa coupe par pied de deux taillis cy devant nommés pour la somme de 1.170 livres et le parsus faisant 178 livres, ledit sieur de K/lozrec paiera audit sieur de K/jan dans le premier jour de novembre prochain venant et au moyen de ce que dessus ledict sieur de Kerjan audict nom se tient pour bien et deument partagé esdites successions tant héritières que mobilières renonceant dès à présent à tous supplément de partage et autres demandes quelconques mesme au supplément que ledict sieur de K/lozrec prétend avoir du seigneur de Mesle pour le partage de sa deffuncte mère et en quoy il demeure subrogé pour tout l'intérest desdits sieur et dame de K/jan ce que dessus. Lesdites partyes ont promis et se sont obligés l'une vers l'autre fournir et exécuter devant nous Jan Le Lanier et Guillaume Roparts, notaires de la cour et principauté de Léon à Landerneau avec soumission et prorogation de jurisdiction à icelle à toutes renonciations, condamnations, obligations, liaisons, et finalement mesme ledit sieur de K/jan promet faire ratiffier ce présent acte de partage par sadicte compagne 15 jours après que ledit sieur de K/lozrec devant ledit âge de 25 ans aura faict pareille ratiffication ce qu'il promet et s'oblige faire sur les mesmes obligations que devant. Faict et gré, juré, stipullé, accepté desdites partyes au manoir de Penanchoar sous leurs signes et les signes desdicts sieurs de K/goff et de K/menguy, les signes des sieurs de Penanch et de K/jan, leurs beaux-frères présents sur ce que dessus ô nosdicts nottaires soussignants le 25è jour d'avril 1609, après midy. Ainsy signé Jean de K/sulguen, Guillaume Mol, Hervé de K/sulguen, Prigent K/lech, X. Vernisac, B. K/sainctgilly, G. Roparts nottaire, J. Lelanier nottaire. Le registre demeure chez ledict Roparts.
Ce chapitre sur les seigneurs de Pencran nous a amenés, avec la famille de Kersulguen et ses alliances, jusqu'à Trebabu. Je ne peux résister à l'envie d'insérer ici une photo du magnifique château de Kerjan-Mol.
Le château de Kerjan-Mol à Trebabu
Ancien manoir élevé au XVIe siècle, agrandi dans la deuxième moitié du XIXe siècle par la construction d'une aile en retour d'équerre et d'une tour. Sa chapelle privée est dédiée à saint Cado et à sainte Anne. Propriété de la famille Mol qui se fond, dès 1733, dans la famille de Kersauson de Goasmelquin. Il appartient à la comtesse de Kersauzon au début du XXe siècle. C'est un bâtiment de plan en L. Agrandissement et restauration de style néo-gothique au XIXe siècle. Une tour dans oeuvre de plan carré établit la jonction entre les deux ailes de bâtiments. Elévation ordonnancée de moellon enduit avec encadrements de baies, lucarnes et encorbellement en pierre de taille. (source Châteaux de France).
Recherche des propriétaires du château :
la famille MOL ; la famille de KERSAUSON, branche de KERJAN ; jusqu'à un certain KERSAUSON de PENANDREFF :
Antoine du CHASTEL, Sieur de Mesle et de Châteaugal ca 1510 & Marie LESCANFF ca 1520 |
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Françoise du CHASTEL +/1609 &1582 Jean de KERSULGUEN +1604 |
Isabeau du CHASTEL &1579 Alain de KEROUARTZ, sieur de Kerthomas et de Kerouartz 1552-1602 |
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Catherine de KERSULGUEN 1588 & Guillaume MOL, seigneur de Kerjan, dont : |
Françoise de KEROUARTZ 1582-1644 & Herve de KERSAUSON, +1624, seigneur de Penandreff, dont : |
Après le décès de Jeanne Plisson, le château de Kerjan-Mol est recueilli fin 1995 par Olivier de Kersauson, qui fonde une société civile avec son fils Arthur.
Superbe dossier
aux archives municipales
de Landerneau.
André J. Croguennec - Page créée le 1/5/2017, mise à jour le 10/4/2020. | |