Les frères Frimot |
Jacques Frimot, ingénieur des Ponts-et-Chaussées, a établi les plans de plusieurs moulins de Pont-Christ ou des environs : celui du moulin de l'Elorn en 1821, ceux du Frout et de Kerigeant en 1827. Il élabora aussi les plans du nouveau pont de Pont-Christ en 1822 et en 1832.
En effet, Jacques Joseph Frimot n'était pas seulement le concepteur génial des machines à vapeur qu'il construisit, à titre privé, dans son usine de Landerneau, il était d'abord l'ingénieur des Ponts-et-Chaussées de cet arrondissement, responsable du "service ordinaire". Ce service comprend tous les services permanents à la différence du service extraordinaire qui a pour objet les travaux publics non permanents, tels que l'établissement de chemins de fer, de canaux, ...etc. L'arrondissement de Landerneau était l'un des trois arrondissements du Finistère, avec Chateaulin et Quimper.
Quant à Jean-Baptiste, après avoir été fabricant d'huile au moulin de l'Elorn à La Roche, il eut comme mission, entre autres, en tant que conducteur des Ponts-et-Chaussées, de surveiller et d'entretenir la route nationale 12 qui passera par Pont-Christ à partir de 1843. C'est, probablement, lui qui travailla sur le nouveau tracé longeant l'Elorn de Landerneau à Landivisiau.
En règle générale, dans chaque département, l'ingénieur en chef était placé sous l'autorité immédiate du préfet, sous l'autorité supérieure du directeur général, sous la surveillance de l'inspecteur divisionnaire.
Avec le concours des ingénieurs ordinaires et du personnel de son service, il établissait les projets, les marchés, les décomptes des entreprises et les adressait au préfet pour transmission, approbation ou mandatement. Il faisait tenir la comptabilité du service. Il devait parcourir, dans ses tournées, au moins deux fois l'an, les routes de son département. Il était secondé par un ou plusieurs ingénieurs ordinaires et par des conducteurs.
Pour accéder à la fonction d'ingénieur, il fallait sortir de Polytechnique et choisir ensuite à l'école d'application des Ponts-et-Chaussées.
Conducteur :Chargé sous les ordres des ingénieurs ordinaires de la surveillance et du contrôle des travaux et des fournitures, il secondait les ingénieurs pour les levers de plans, et constatait les contraventions en matière de grande voirie. Un conducteur au moins était attaché à chaque ingénieur.
Nommé par le directeur général sur proposition de l'ingénieur en chef, il devait savoir lire, écrire, toiser, lever des plans élémentaires et les dessiner au trait et avoir travaillé pendant deux ans dans un bureau des Ponts et Chaussées comme surnuméraire ou employé.
Les conducteurs, autres que les aspirants conducteurs, étaient répartis en trois classes. Ceux qui appartenaient à la même inspection divisionnaire formaient une brigade.
Quand Jacques Joseph Frimot fut nommé dans le Finistère en 1820, le département était divisé en trois arrondissements de Ponts-et-Chaussées : 1er arrondissement : Landerneau, qui allait d'Ouessant à Morlaix, sous la responsabilité de Frimot ; 2è arrondissement : Quimper, sous la responsabilité de Louis Martret-Préville ; 3è arrondissement : Châteaulin, sous la responsabilité de Jean-Marie de Silguy. On verra plus bas qu'il y aura du changement en 1823.
10/06/1790 | Naissance à Saint-Germain-le-Gaillard (Manche) |
01/11/1808 | Entrée à l'école polytechnique |
01/11/1810 | Entrée à l'école des Ponts-et-Chaussées |
21/04/1811 | En mission dans le département de la Gironde pour le projet du pont Cubzac sur la Dordogne, sous les ordres de l'inspecteur divisionnaire.
Le 11/11/1811, sa mission est prolongée jusqu'au 15 décembre 1811, afin de terminer le travail des sondes de cette rivière. |
01/05/1812 | En mission dans le département du Haut-Rhin pour le canal Napoléon, dans l'arrondissement de Brisach, sous les ordres de M. Liars, inspecteur divisionnaire, directeur du canal |
01/05/1813 | En mission dans le département de la Gironde pour le pont de Bordeaux, sous les ordres de M. Vauvilliers, ingénieur en chef.
Il s'agissait du "pont de pierre", inauguré en 1822, appelé aussi "pont Napoléon". Ce fut le premier pont de Bordeaux qui permit de traverser la Garonne pour relier le centre ville aux quartiers de la rive droite.
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01/01/1815 | Affecté à Paris.
Pourtant, après Bordeaux, il espérait travailler pour le pont d'Agen, auquel le destinait son ancien responsable. En effet, M. Deschamps, inspecteur de la 10è division, directeur du pont de Bordeaux, écrit le 24/12/1814 : "Permettez-moi, M. le Directeur général, de vous entretenir de l'opinion que j'ai conçue de cet élève et du service auquel je le crois plus particulièrement propre. Mr Frimot qui depuis plus d'une année est sur les rangs pour le grade d'aspirant, et qui va sans doute en être pourvu, est un jeune ingénieur d'une instruction solide et étendue ; il a donné différentes preuves de capacité, et s'est singulièrement formé pendant les deux campagnes qu'il a faites au pont de Bordeaux, où il a recueilli de très bonnes observations. |
01/06/1815 | Nommé aspirant provisoire.
"Le 6 juin 1815. Je jure obéissance aux constitutions de l'Empire, et fidélité à L'Empereur. |
01/10/1815 | Placé dans le département de la Vendée pour y être employé aux travaux des bâtiments civils de Bourbon-Vendée
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01/04/1819 | Passé au département de Haute-Garonne pour être attaché aux travaux du canal du midi, sous les ordres de M. Gorsse, ingénieur en chef.
A la fin de l'année 1819, on le retrouve à Agde : le 11 octobre 1819, il dévoile au directeur général ses idées sur les "ponts fottants" et ses compléments de réflexions sur les écluses (cf sa lettre en annexe 2).
Frimot obtient une mutation dans le Finistère. Il demandera de reporter son arrivée à Landerneau au 15 juin car il avait "absolument besoin d'aller à Cherbourg pour des affaires de famille". Il arrivera à Landerneau, le 17 juin 1820. En fait, il avouera, plus tard, qu'il profita du délai accordé, "au mois de mai dernier, pour visiter les principaux établissements de Paris et Londres où l'on fabrique des machines à vapeur". Il avait donc déjà une idée derrière la tête. |
17/06/1820 | Passé dans le département du Finistère à Landerneau (en vert, ses périodes landernéennes)
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1823 | Extension de l'arrondissement de Landerneau.
Au début de 1823, le service ordinaire du 3è arrondissement du Finistère, celui de Châteaulin, dont Jean-Marie de Silguy était chargé, fut réparti entre les ingénieurs des deux premiers arrondissements. Donc, entre Frimot et Louis Martret-Preville, qui avait en charge l'arrondissement de Quimper. M. de Silguy était, en effet, appelé à s'occuper du canal de Nantes à Brest. Frimot se trouve devoir gérer 130 lieues de route sur les 200 lieues du Finistère. En effet, sur les 53 lieues de lieues de route de l'arrondissement du centre, 39 lieues lui ont été confiées. De plus, dit-il à propos de l'arrondissement de Landerneau, "les ports de Morlaix, de Landerneau, de Roscoff, du Conquet et d'Ouessant, où l'on fait des ouvrages neufs, complètent cet arrondissement qui est le plus considérable de France" (lettre du 14/11/1826). Mais Frimot peut-il tout assumer, vu l'importance aussi de ses activités privées ? Ce n'est pas certain (cf la lettre, du 9 janvier 1828, de la préfecture de Quimper au Directeur général des Ponts-et-Chaussées) qui constate que "les soins de Mr Frimot sont à peu près nuls pour l'arrondissement de Châteaulin. A peine même s'occupe-t-il de l'arrondissement de sa résidence", et "les absences multipliée de Mr l'Ingénieur nuisent au service général des Ponts-et-Chaussées de ce département". |
1827 | Mémoire sur l'établissement d'une navigation à grand tirant d'eau entre Paris et la mer par la voie fluviale.
où il démontre, en 128 pages, que la solution n'est pas de créer un canal latéral, trop coûteux et sujet à de nombreuses incertitudes de réalisation et de fonctionnement, mais d'aménager le cours de la Seine. Malgré ses activités publiques et privées à Landerneau, il avait donc encore le temps de s'intéresser et d'écrire sur d'autres sujets !!! Le 21 juillet 1827, il écrit, de Landerneau, à M. Becquey, directeur général des P. et C. : "... Je vous prie, Monsieur le Directeur Général, de vouloir bien agréer l'offre d'un exemplaire du mémoire que je viens de publier sur la question de l'établissement d'une navigation à grand tirant d'eau, entre Paris et la mer par la voie fluviale. cet ouvrage est moins parfait et moins important que mon invention de pompes à vapeur, mais je suis sûr qu'il renferme quelques idées utiles au progrès de l'art de l'Ingénieur. Je suis sûr qu'il contribuera à faire renoncer au projet désastreux du canal latéral à la Seine pour la navigation des bâtiments de mer. C'est le seul but que je me suis proposé par la publication de ce mémoire. Jusqu'ici il n'est entré heureusement ni ambition ni aucun désir de rivalité dans mes travaux. J'ai été à même de suivre les mouvements de la conscience placée sous la volonté de rendre ma vie utile à mon pays. |
30/08/1828 | Nommé ingénieur ordinaire de 1ère classe. |
01/08/1834 | Il quitte Landerneau pour Paris. Il est remplacé par M. Lacroix, aspirant ingénieur. |
01/08/1834 | Passé au service des études d'un chemin de fer de Paris à Orléans par la vallée de la Seine, de l'Orge et de la Juine |
01/06/1841 | Chargé du service de l'atelier central des ponts à bascule |
1841-1842 | Il enseigne à l'Ecole des Ponts et Chaussées. |
23/01/1842 | Nommé ingénieur en chef de 2è classe. |
01/05/1843 | Chevalier de la légion d'honneur
Mr Frimot (Jacques Joseph), Ingénieur en chef des Ponts-et-Chaussées, compte plus de 32 ans d'excellents services. Attaché successivement aux travaux du Pont de Bordeaux et du canal du Midi, au service ordinaire des départements de la Vendée et du Finistère, aux études d'un chemin de fer de Paris à Orléans, chargé en dernier lieu du service de l'atelier central des ponts-à-bascule, Mr Frimot s'est constamment montré dans ces différents postes, ingénieur aussi habile que dévoué. Mr Frimot s'est occupé avec un franc succès de mécanique pratique. Ses travaux à cet égard ont été d'une haute utilité, non seulement pour l'administration, mais aussi pour l'industrie privée. La distinction aussi bien que l'ancienneté des services de cet ingénieur en chef lui donne de justes titres à la décoration de la légion d'honneur. |
01/01/1846 | Ses frais fixes sont portés de 1.000 à 2.500 francs |
01/04/1848 | Pension de retraite de 3.000 francs, correspondant au grade d'ingénieur en chef de 2è classe
En retraite, il reprend ses recherches sur les machines marines à l'Arsenal de Toulon. Désormais "libéré d'obligations qu'il confiait lui avoir bien un peu pesé, il put reprendre ses recherches sur les machines marines (essentiellement sur les chaudières tubulaires) mais il se tourna cette fois vers l'arsenal de Toulon, l'inébranlable rival de Brest". |
1851 | Il est recensé à Landerneau, à "La Bascule", avec son épouse Caroline Rousseau et deux domestiques. |
03/06/1866 | Décès à Landerneau |
L'usine de Frimot à Landerneau
Localisation de l'usine de Frimot d'après le plan du cadastre de Landerneau en 1827.
Elle était située au bord du chemin donnant sur la grande route de Brest, après le lieu-dit "La Bascule", où l'on peut lire l'indication : "usines de pompes à vapeur".
En médaillon, le plan plus détaillé.
On trouvera une reconstitution plus précise dans l'ouvrage Histoire de Landerneau, paru en 2016. Dans ce livre, la reconstitution de l'usine de Frimot paraît très différente de sa représentation sur le plan cadastral de 1827. Voici pourquoi : "L'usine définitive fut élevée en deux campagnes de construction de 1826 à 1829, suivant un programme d'extension planifié d'entrée de jeu". Cf Marine et industrie en Bretagne de Catherine Abeguile-Petit (thèse de doctorat d'histoire 2002).
Description de l'usine par Emile Souvestre dans Les derniers Bretons | ||
Il y a quelques années qu'un ingénieur distingué, M. Frimot, établit à Landerneau une fabrique de machines à vapeur. C'était une entreprise d'autant plus hardie, que tous les instrumens d'exécution, y compris les ouvriers, étaient à créer. M. Frimot tentait, d'ailleurs, la résolution d'un problème entièrement neuf, en fait d'application de la vapeur. Les machines qu'il voulait faire exécuter étaient l'essai d'un système personnel ; les mécaniques d'exploitation elles-mêmes avaient toutes été inventées par lui, car M. Frimot était un de ces hommes qui s'approprient toutes les idées en les timbrant à leur cachet, ... On conçoit quelles étaient les difficultés pour faire ainsi sortir du néant tout un nouveau monde industriel ! Mais M. Frimot ne s'en effraya pas ; il appela autour de lui tout ce qu'il trouva de taillandiers de village, de serruriers de carrefour, d'armuriers de bourgades. Le port de Brest lui fournit quelques forgerons non pas habiles, mais habitués aux grands fourneaux et aux grands soufflets des vastes usines. Ce fut avec ces ouvriers vulgaires qu'il commença. Pendant les premiers mois, il y eut de quoi devenir fou de colère et de désespoir. Les cent bras de l'usine allaient comme une machine détraquée, sans ordre, sans intelligence ; la pensée de l'inventeur, mal comprise ou maladroitement exécutée, n'entrait dans les tenailles du forgeron que pour en sortir parodiée et ridicule ; sa création, mise vingt fois sur l'enclume, forgée, faussée, déformée en tous sens, en sortait enfin monstrueusement traduite, véritable caricature du plan harmonieux qu'il avait tracé. M. Frimot fit recommencer l'oeuvre, sans étonnement et sans impatience. Cette fois le travail prit une marche plus habile ; les marteaux avaient appris leur métier pendant le premier essai ; l'ouvrier breton s'était aguerri dans cette lutte contre le fer, la houille et le feu ; il avait deviné les moyens de les maîtriser, d'en faire des esclaves utiles. Cette fois la matière obéit à l'intelligence, les métaux se pétrirent et se contournèrent docilement sous l'action de sa volonté ; une première machine s'éleva et entra en action. Ce fut un jour véritablement solennel que celui où cette machine s'agita sous l'effort de la vapeur, et où le premier coup de piston fit retentir l'édifice. Ils étaient là, tous ces ouvriers sortis quelques mois auparavant de leurs hameaux, et qui n'avaient jamais vu semblable merveille ; ils étaient là, le cou tendu, les yeux fixes et presque épouvantés devant leur propre ouvrage ; ils regardaient cet être étrange de fer et de cuivre dont ils avaient laborieusement limé les membres pendant six mois, qu'ils |
avaient fabriqué et monté pièce à pièce, et qui maintenant, animé d'une sorte de vie intérieure, lançait sa grande voix dans l'espace, et agitait ses bras de géant. Pendant plusieurs jours, ils ne purent passer devant la machine, sans détourner la tête avec une surprise d'enfant, qui n'était pas exempte d'une superstitieuse inquiétude ; mais peu à peu ils s'habituèrent à sa présence ; ses rauques sifflemens devinrent pour eux comme une voix amie et accoutumée ; ils ne purent plus travailler sans l'entendre ; ils l'avaient baptisée du nom de Jeannette, et quand elle était arrêtée, ils disaient d'un air triste : - Jeannette dort aujourd'hui ; et les marteaux tombaient plus languissamment sur l'enclume, et il semblait à tous qu'il manquait quelque chose à l'atelier. Plus tard, l'établissement s'agrandit ; de nouvelles machines furent exécutées, et le nombre des travailleurs augmenta ; mais M. Frimot continua à les prendre parmi les ouvriers du pays. Nous avons été témoin de l'entrée dans les ateliers de plusieurs de ces campagnards, et c'était en vérité chose plaisante que de voir leur admiration inquiète, au milieu de tous ces bras de fer qui s'agitaient autour d'eux. Ils regardaient comme des enfans étonnés ces machines élégantes ; ils tournaient autour avec une sorte de précaution respectueuse ; ils n'osaient approcher de peur de les gêner ; ils leur auraient volontiers tiré le chapeau par politesse, car c'était pour eux plus que du fer et de l'acier : c'étaient des espèces d'ouvriers mystérieux et intelligens, tels qu'ils n'en avaient encore jamais rencontré dans la vie. Mais cette naïve ignorance durait peu ; le nouveau venu se formait vite au feu de la grande forge. Un mois après leur arrivée, on voyait tous ces campagnards niais et peureux se jouer au milieu des étincelles et de la fumée, comme de vrais cyclopes habitués à vivre dans les flammes ; se lancer l'un à l'autre, fringans et rieurs, les gueuses de fer rougi, et jeter à pleine poitrine les cantiques ou les guerz bretons, au milieu des monotones battemens du piston et des sourds rugissemens de la chaudière bouillante. Malheureusement, ces essais qui avaient constaté si brillamment l'aptitude des Bretons pour les arts mécaniques, furent ruineux pour celui qui les faisait. Cette étude expérimentale, faite par le maître et les ouvriers, avait été entreprise sur une échelle trop vaste pour les ressources matérielles de M. Frimot, et il fut forcé d'arrêter cet élan industriel qu'une fortune particulière ne pouvait entretenir. o:o:o |
Etudiant | 1819 | Il "étudie à Rennes pour subir à la fin de cette année les examens d'admission à l'Ecole Polytechnique" (lettre de Jacques Frimot du 2/4/1819). La suite de sa carrière ne montre pas qu'il ait intégré l'X. | |||||||||||||||||||||||||||||
Fabricant d'huile | 1822-1823 | Source : registres d'état-civil de Landerneau et de La Roche | |||||||||||||||||||||||||||||
Architecte | 1826 | Source : son acte de mariage | |||||||||||||||||||||||||||||
Ponts-et- Chaussées | Conducteur auxiliaire de 3è classe | 30/08/1827 |
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Conducteur auxiliaire de 2è classe | 28/03/1835 | ||||||||||||||||||||||||||||||
Conducteur auxiliaire de 1ère classe | 01/03/1840 | ||||||||||||||||||||||||||||||
Conducteur embrigadé de 3è classe | 01/11/1840 | ||||||||||||||||||||||||||||||
Conducteur embrigadé de 2è classe | 15/09/1848 | ||||||||||||||||||||||||||||||
Conducteur embrigadé de 1ère classe | 01/01/1855 | ||||||||||||||||||||||||||||||
Directeur d'usine | 1834 | Il reprend l'usine de construction de machines à vapeur créée par son frère, reconvertie dans la fabrication d'instruments aratoires. Elle fermera en 1859. | |||||||||||||||||||||||||||||
Décès | 1860 |
Bourbon-Vendée, le 10 novembre 1817.
A Monsieur Becquey, conseiller d'Etat,
Directeur général des Ponts-et-Chaussées et des Mines.
Monsieur le Directeur général,
Le service de l'arrondissement de Bourbon-Vendée auquel je suis attaché depuis environ deux ans, m'ayant toujours laissé des loisirs, je les ai consacrés à l'étude d'un projet dont l'intérêt seul peut exciter de grands efforts, et dont l'exécution, supposée possible, aurait la plus heureuse influence sur tous les genres d'industrie commerciale ou agricole.
Ce projet aurait pour but l'établissement peu dispendieux d'une navigation prompte et facile, partout où l'on pourrait entretenir d'eau un canal qui n'aurait à éprouver d'autres pertes que celles des filtrations et de l'évaporation.
Avant d'avoir l'honneur de vous exposer les divers avantages que semble offrir ce projet dont les idées fondamentales sont, je crois, entièrement ignorées, je dois vous prévenir, pour étayer un peu votre confiance, que je n'ai point hâté mes réflexions, que j'ai pris tous le tems nécessaire pour bien ordonner les différentes parties du projet, qu'après m'être bien rendu compte de la possibilité de son exécution, j'ai fait construire un plan-relief ou modèle sur lequel tout le monde peut asseoir son jugement, et je n'imagine pas que la réduction de l'échelle dérobe la connaissance d'une difficulté qui pût entraver la construction de grandeur naturelle.
J'ai communiqué mon projet à quelques ingénieurs qui m'ont encouragé dans le dessein de vous prier de permettre que je vous l'adresse, et vous le soumettrez si vous le jugez convenable, à la censure d'une commission choisie parmi les membres du Conseil général des Ponts-et-Chaussées.
Vous n'ignorez pas, Monsieur le Directeur général, que le principal obstacle qui a empêché l'ouverture d'un grand nombre de canaux en France, est la dépense d'eau qu'exige le passage d'un bateau d'un bief dans le bief contigu. Cette dépense est telle que pour alimenter le bief de partage du canal du Languedoc, on a été obligé de construire à grands frais de vastes lacs artificiels qui servent de réservoirs, et de creuser de longues rigoles pour amener leurs eaux jusque dans le bief de partage. Ces ouvrages accessoires ne sont pas la partie la moins dispendieuse, ni la moins étonnante de tout cet ouvrage admirable. On n'a point établi de bassins ou lacs pour alimenter les canaux ouverts postérieurement à celui du Languedoc ; mais on est contraint d'y suspendre la navigation durant les plus beaux mois de l'année, et l'on profite de ce long chômage pour réparer les ouvrages d'art.
Agde, le 11 octobre 1919.
A Monsieur Becquey, conseiller d'Etat,
Directeur général des Ponts-et-Chaussées et des Mines.
Monsieur le Directeur général,
Il y aura incessamment deux années que j'eus l'honneur de vous adresser un sujet d'écluses flottantes dont le but était de diminuer les frais de construction et la dépense d'eau pour opérer le passage des barques dans deux retenues qui n'ont pas le même niveau. Vous daignâtes partager mon espoir de succès, et pour le réaliser je résolus d'appliquer désormais tous mes loisirs au perfectionnement d'un ouvrage qui avait mérité votre approbation.
Sans perdre de vue l'objet principal de mes recherches, je n'ai pu détourner mon attention de quelques idées suggérées comme par hasard, et insensiblement elles ont acquis un degré de perfection qui me les ferait juger dignes de vous être soumises s'il m'était permis de vous présenter un nouveau projet.
Ponts flottantsL'établissement des ponts sur les cours d'eau de toute espèce comprend à peu près tous les éléments des constructions les plus difficiles qu'aient à diriger les ingénieurs. Par leurs recherches et leur aptitude, la construction des ponts fixes n'offre plus d'obstacles invincibles même sur les fleuves les plus profonds. Mais les frais d'exécution sont quelquefois si excessifs, qu'il n'appartient qu'aux plus riches Etats d'assurer la communication d'une rive à l'autre des grands ports de l'intérieur, et de ne l'établir encore qu'avec lenteur comme les monuments qu'on érige à la postérité.
L'intérêt du commerce et le besoin de relations entre deux pays voisins réclament des constructions plus faciles, plus promptes et moins dispendieuses. Il appartient aux ingénieurs d'atteindre ce but ; mais si une idée est le produit d'un instant, elle ne se perfectionne que peu à peu, par une suite d'heureuses modifications, qui appartiennent rarement à un seul. Les premiers essais ont donc besoin d'indulgence et d'encouragement.
Cependant votre indulgence pleine de bonté pour tous ceux qu'anime le désir de bien faire, dispose et excite à vous présenter de nouveaux ouvrages, j'y ajouterai pour moi le besoin de justifier l'opinion favorable que vous avez conçue sur le succès de mes écluses fottantes.
Ecluses flottantesPermettez-moi, Monsieur le Directeur, d'exprimer ici en quelques lignes les perfectionnements qu'elles ont acquis depuis que j'ai eu l'honneur de vous présenter le projet. Je suis parvenu à réduire ce système d'écluse à un plongeur et un sas, à peu près de même capacité que les barques de canal, pour les cas où l'on pourrait à chaque passage disposer d'un volume d'eau un peu plus grand que celui du plongeur, ce qui n'est que le 1/4 ou le 1/5è de la dépense d'eau par les écluses ordinaires. Alors toutes les parties de l'écluse se trouvant en contact avec l'eau, le tems améliorerait la charpente au lieu de l'altérer, et les réparations ou frais d'entretien de ces ouvrages seraient presque nuls.
Lorsqu'on ne peut disposer que de 9 à 10 mètres cubes d'eau à chaque passage, deux écluses flottantes, latérales, et composées seulement d'un sas et d'un plongeur pourraient en même tems opérer le passage de deux barques, l'une de montée, l'autre de descente. L'eau du plongeur plein transvasée dans le plongeur vide ferait mouvoir les deux écluses en sens contraire au moyen d'une force initiale qui résulterait de l'addition d'un poids d'eau de 5 à 6.000 kg, à l'un des sas, et emprunté à la retenue supérieure : la vidange durerait autant que le mouvement des écluses qui s'opérerait presqu'uniformément et sans nulle autre puissance que celle de l'eau.
Si ces améliorations faites au sujet des écluses flottantes, ainsi que le nouveau système de pont que je viens de décrire vous semblent de votre examen, j'aurai l'honneur de vous adresser les dessins, devis et détails estimatifs
1° d'un projet de pont flottant et immobile dont les pontons seraient exécutés en bois,
2° d'un pont semblable dont les flotteurs et les piles ou palées seraient construits en fonte de fer,
3° d'une écluse isolée dont le mouvement dépend de la chute de l'eau du biez ou retenue supérieure,
4° de deux écluses flottantes latérales dont le jeu s'opère en sens contraire et qui peuvent servir à la fois au passage de deux barques, parce que l'une des écluses se trouve toujours au niveau de la retenue d'amont et l'autre au niveau de la retenue d'aval.
Si vous pensez que l'essai de l'un quelconque de ces projets puisse s'effectuer au frais du Trésor, je solliciterais seulement la liberté de faire durant l'exécution toutes les améliorations qui ne changeraient rien aux bases principales discutées et arrêtées en Conseil des Ponts et chaussées, jusqu'à concurrence d'une somme de 3.000 francs.
Si vous permettez que l'essai puisse avoir lieu aux risques et périls d'un concessionnaore, je connais des capitalistes qui ne demanderaient aucune indemnité en cas de mauvaise réussite, et qui dans le cas contraire rempliraient leurs obligations avec loyauté. J'associerais avec plaisir à mes travaux les ingénieurs qui voudraient bien les partager, et leur en abandonnerait volontiers la surveillance exlusive dès qu'ils se jugeraient en état de les conduire seuls à leur fin.
C'est ainsi, Monsieur le Directeur général, que j'ai toujours pensé et que je me serais toujours conduit si la possibilité d'exécuter des ouvrages utiles et considérables n'était, en certains lieux, anéantie par une forte volonté de ne rien faire et même d'empêcher qu'il ne se fasse rien.
Je suis avec un profond respect, Monsieur le Directeur général, votre très humble et très obéissant serviteur. Frimot.
Réponse de la direction des Ponts-et-Chaussées
A M. Frimot, ingénieur des Ponts et Chaussées d'Agde
M. j'ai lu avec une grande attention la lettre que vous m'avez fait l'honneur de m'écrire relativement à votre projet de ponts flottants. Les détails que cette lettre renferme font voir que le nouveau système que vous proposez a été longtems l'objet de vos méditations. Toutefois ils ne suffiront point pour donner une idée complète de ce système ; et ce n'est que d'après un projet régulier qu'on peut être fixé sur la question de savoir s'il convient de l'adopter. Je ne puis donc que vous engager, Monsieur, à m'adresser ce projet lorsque vous l'aurez complété, et que vous le jugerez susceptible d'un application réelle, c'est assez vous dire que vous devez étudier encore votre système, et vous assurer avant de le produire que vous ne vous faites point illusion sur ses avantages. Vous sentez très bien qu'en fait d'innovation, il importe de ne céder qu'à une conviction profonde et de ne point se laisser séduire par des conceptions qui pour être ingénieuses n'en sont pas moins quelquefois inadmissibles dans l'exécution. Votre bon esprit saura se mettre en garde contre ce danger. Vous ne devez point douter au surplus de l'attention avec laquelle les propositions que vous croirez devoir faire seront examinées. Les efforts des ingénieurs qui, comme vous, s'occupent de ce ce qui leur paroit devoir concourir au bien général, sont dignes d'intérêts ; et j'apprécie en particulier un dévouement et des efforts qui ne peuvent que les honorer.
Les réflexions qui précèdent sur votre système de ponts s'appliquent naturellement à celui des sas flotans. Plusieurs ingénieurs pensent qu'ils ne seront jamais préférables aux sas ordinaires que dans quelques localités seulement, où il faudroit absolument économiser l'eau, et encore cette économie seroit-elle réduite à très peu de chose en comparant votre projet avec des écluses ordinaires auxquelles on rajouteroit des réservoirs latéraux. Les sas mobiles les plus parfaits auront toujours contre eux l'inconvénient attaché à toute grande masse en mouvement ; et ils exigeroient de plus une perfection d'exécution souvent difficile à obtenir en grand et indispensable cependant pour assurer leur succès. Telles sont les principales objections auxquelles donne lieu votre système ; vous pourrez examiner s'il y a des moyens de remédier à ces inconvénients ; et présenter ensuite le résultat de vos recherches, si elles vous conduisent à reconnaître qu'il est possible de les prévenir.
Je pense, d'après ces observations, qu'avant d'autoriser, ainsi que vous le proposez, l'exécution de vos projets, il convient qu'ils soient mûrement examinés. Je sais que des essais en grand sont quelquefois nécessaires pour mettre à portée de bien apprécier les avantages ou les inconvénients des nouveaux systèmes ; mais encore est-il indispensable de se fixer par un examem approfondi des projets présentés. Sur la convenance de se livrer à de tels essais, s'il en étoit autrement, on ne feroit le plus souvent que des réponses inutiles ; et le premier devoir de l'administration est de n'autoriser que celles dont on doit recueillir des fruits.
Je pense également qu'il est inutile, du moins quant à présent, de faire faire des modèles de vos ponts et de vos écluses. Il est toujours difficile d'asservir un jugement ??? d'après la seule vue d'un relief qui n'a que de petites dimensions. Il suffira pour le moment que vous produisiez vos projets accompagnés de dessins sur une grande échelle et d'estimations précises et détaillées des travaux auxquels ces projets donneroient lieu. L'examen qui en sera fait indiquera s'il est nécessaire d'autoriser la confection de modèles ou de recourir à des expériences en grand.
Landerneau, le 14 février 1821.
A Monsieur Becquey, conseiller d'Etat,
Directeur général des Ponts-et-Chaussées et des Mines.
Monsieur le Directeur général,
Il me serait agréable d'avoir à vous offrir l'hommage de quelque invention utile à la société, et à puiser dans votre bienveillance la protection qui hâte et asssure le succès des nouvelles entreprises, que je trouve dans mes désirs un motif pour vous prier de me mettre à même d'exécuter un nouvel appareil à vapeur dont la simplicité et la facilité de la construction sont de nature à rendre d'un usage commun la puissance la plus extraordinaire que l'esprit humain ait pu concevoir.
Afin de ne rien présenter qui fût déjà connu ou inférieur aux nouvelles découvertes, j'ai usé du congé que vous eutes la bonté de m'accorder au mois de mai dernier pour visiter les principaux établissements de Paris et de Londres où l'on fabrique des machines à vapeur. J'ai pris connaissance des divers ouvrages publiés sur ces machines, notamment de celui de Sir W. Congreve, l'inventeur des fusées incendiaires qui portent son nom ; je crois avoir vu et connaître ce qui a été fait et projeté de plus parfait sur ces appareils, du moins je n'ai rien épargné pour y parvenir, et si je n'avais l'intime persuasion que celui que je propose d'exécuter aura une grande supériorité sur ceux qui existent, tant sous les rapports d'économie dans les dépenses d'achat et de combustible, que sous celui de sa simplicité, je n'aurais pas pris la liberté de vous en entretenir.
Personne que je sache n'a encore émis l'idée d'employer la puissance de la vapeur à comprimer un liquide pour le faire agir directement par sa force d'impulsion ou son propre poids, et en faire une force motrice pareille à celle de l'eau qui communique le mouvement aux roues des moulins ordinaires en tombant d'une certaine hauteur.
La vapeur, dans les appareils à pompe, s'accumule dans un cylindre, et par sa force d'expansion déplace un piston qui transmet au dehors son mouvement de va et vient que l'on change selon les besoins en mouvement de rotation continu. Les bielles employées à cette transformation de mouvement occasionnent une perte de force qui est au moins la moitié de la force naturelle, indépendamment des frottements d'un attirail de pièces dont le poids est évalué à raison de 700 kg pour la force d'un cheval.
Beaucoup de mécaniciens ont cherché à obtenir directement le mouvement de rotation continu, mais toujours en suivant le principe de l'accumulation et de l'expansion de la vapeur entre une paroi fixe et un piston mobile, et l'on a reconnu qu'il est pour ainsi dire impossible de conserver en contact parfait deux surfaces dont l'une est animée d'un mouvement de rotation.
Dans un ouvrage publié à Londres en 1819, Sir W. Congrève rend compte d'une machine à vapeur construite d'après un nouveau principe où il obtient le mouvement rotatoire sans aucun attirail de pompe, de bielles, ... etc. Un fourneau, sa chaudière divisée en plusieurs compartiments et une roue à aubes qui se meut dans l'eau par l'impulsion d'un courant de vapeur forment tout son appareil. C'est le plus simple que l'on puisse imaginer : il n'y a point de condenseur. Mais en le supprimant le chevalier Congrève semble avoir ignoré que la vapeur, dans son appareil comme dans tout autre où elle se répandra dans l'air, est obligée de vaincre la pression atmosphérique avant de produire aucun effet, ce qui réduit la force effective à une trop petite fraction de la force naturelle pour que sa nouvelle machine soit employée.
Mon appareil étant muni d'un condenseur, il n'occasionne point cette perte de force, et comme il produit le mouvement direct de rotation, il en résulte une grande épargne dans la dépense de combustible qui sera dans le rapport d'environ 3 à 1 comparativement aux meilleurs machines existantes. Dans ce nouveau système un appareil à vapeur de la force de 6 chevaux coûtera 2.000 francs, de la force de 10 chevaux 3.000 francs, de la force de 20 chevaux 5.000 francs... etc.
En me bornant à énoncer le principe qui m'a conduit à cet appareil et fondé sur l'emploi immédiat d'un liquide comprimé par la vapeur dans une chaudière, je n'ai songé, Monsieur le Directeur général, qu'à épargner vos précieux moments ; j'ai cru devoir attendre votre permission pour exprimer mon idée toute entière.
J'eusse désirer pouvoir vous soumettre des résultats constatés par plusieurs expériences, mais le service actif dont je suis chargé et encore plus le manque d'ouvriers intelligents dans la petite ville que j'habite m'ont empêché de me livrer à ces expériences, et m'obligent à vous supplier de m'accorder un congé de trois mois à partir de l'époque qu'il vous plaira d'assigner, afin que je sois libre de me rendre où il sera nécessaire pour faire exécuter une machine à vapeur de la force de 6 chevaux, dans l'intention de bien constater ses avantages et de la perfectionner si j'y apercevais quelques défauts. L'intérêt des appareils à vapeur embrasse l'industrie commerciale et l'industrie manufacturière, et leur emploi dans la marine militaire promet à la valeur des succès et des triomphes non moins assurés dans les combats de mer que sur terre.
Le service de mon arrondissement ne pouvant se passer des soins d'un ingénieur pendant trois mois, je profiterai de cette occasion pour vous prier, Monsieur le Directeur, de vouloir bien prendre en considération la demande que je renouvelle depuis plus de cinq ans d'être placé dans le département de la Manche, si l'on y crée cette année un nouvel arrondissement ou s'il s'y trouve une place vacante.
Je suis avec un profond respect, Monsieur le Directeur général, votre très humble et très obéissant serviteur. L'Ingénieur de l'arrondissement de Landerneau. Frimot.
André J. Croguennec - Page créée le 17/1/2017, mise à jour le 21/1/2017. | |