Penhoat

Introduction

Le village de Penhoat se trouve sur la commune de St-Servais, à l'est de l'étang de Brezal. En fait, c'est l'étang et le canal de fuite des eaux du moulin qui sépare la commune de St-Servais de celle de Plouneventer. Les deux communes s'étendent au sud jusqu'à l'Elorn.

Autrefois, St-Servais était une trève de la paroisse de Plouneventer. C'est pour cette raison que l'on trouve souvent dans les archives, notamment dans les B.M.S. de Pont-Christ, "Penhoat en Plouneventer" ou "Penhoat, trève de St-Servais". On trouve assez fréquemment aussi "Penhoat Brezal", ce qui se comprend car notre Penhoat est proche de Brezal, mais de plus, et la photo aérienne plus bas le montre bien, le village est bien au "bout du bois de Brezal". C'est ce que signifie ce nom en breton, ici en écriture moderne : "Penn Koad Brezal" ou "Penn ar C'hoad". Dans la première formulation le complément de nom Brezal a fait disparaître grammaticalement l'article et donc la mutation.

Dans les archives, on trouve aussi la graphie "Penchoat" : ce "ch" serait-il la préfiguration de notre "c'h" actuel ? Sans doute, car nous avons aussi "pen ar choat". Et en français "Chef de Bois", ce qui est assez classique. Autre version, "Pencoet" dans la réformation des fouages de 1426. Tout ceci, légitimé par la grammaire et la linguistique, je n'en dirai pas plus !

En 1843, quand la R.N. 12, passant par Kerfaven et Pont-Christ, a été construite, deux auberges se sont installées à Kerfaven au bord de la route. Les deux maisons existent toujours, l'une est toujours un restaurant. L'autre, l'auberge la plus proche de Pont-Christ, s'est appelée au début "Penhoat Izella" car elle est en contre-bas de notre Penhoat, ce qui se voit bien sur la carte IGN. Mais ceci est une autre histoire, nous en parlerons dans un chapitre dédié.

Sur Plouneventer, au sud-est du bourg, près de Bourlogot, il existe aussi un lieu appelé le moulin de Penhoat : rien à voir donc avec notre village.

Ci-dessus carte IGN actuelle des environs de Pont-Christ, dont le village de Penhoat (sur la droite)

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Penhoat sur le plan extrait du cadastre ancien de Saint-Servais - 1828
 

A la recherche de l'ancienne activité linière

 
1 - Premier site, au village :

Tout près du village, on trouve "970 Parc ar c'handy" et, plus bas au bord de l'Elorn, "959 Foennec ar poullin".

Près de la parcelle 970, on note "972 Foennec ar feunteun", avec une petite construction sur le bord de cette parcelle et sur le bord du chemin qui longe la parcelle 970. Cette construction ne serait-elle pas la buanderie.

Remarque : L'existence d'une fontaine n'est pas directement la marque de la présence d'une activité toilière, mais on sait que l'eau était indispensable pour celle-ci et la présence d'une fontaine à cet endroit est un indicateur supplémentaire de confirmation du site pour ce type de production.

Non loin sur la droite, nous avons "966 et 967 Parc al laouer", "le champ de l'auge". De quelle auge peut-il s'agir ? Une auge pour abreuver les bêtes ? Sans doute, car sa distance par rapport à "Parc ar c'handy" laisse difficilement supposer qu'il puisse s'agir d'une auge à blanchir le fil.

 
2 - Deuxième site, en haut du plan :

Plus au nord, 4 parcelles situées sur une ligne horizontale, "1036 Dour ar handicoz", "1039 Foennec ar handy coz", "1040 Parc dour ar handy coz" et "942 Parc bihan dour ar handy coz", "1096 Goarem vras dour ar handi" et "1098 Goarem ar handi coz". Ces parcelles sont situées le long d'un petit ruisseau, d'où le mot "dour". Le nom de quatre d'entre elles se réfèrent plus au ruisseau qu'à la buanderie. Seules les parcelles 1039 et 1098 désignent directement la buanderie, qui devait donc se située sur ou près de ces parcelles. Malheureusement, en 1828, ce "kanndi" était déjà vieux ("coz") et avait peut-être déjà cesser de fonctionner.

 
3 - Troisième site, en haut du plan :

Au même niveau, plus à l'est (plus à droite), un groupe de 3 parcelles : "831 Foennec ar handi", "834 et 835 Parc ar handi", "876 Poullin". Ici le "kanndi" n'est pas vieux. Y aurait-il eu deux édifices de ce type à des périodes différentes ? C'est problable. Peut-être aura-t-on ici plus de chances de trouver quelques traces de cet édifice sur le terrain.

La recherche systématique dans les registres B.M.S. de Pont-Christ et autres documents d'archives nous a permis d'identifier les personnes suivantes, entre parenthèses leur période d'activité approximative à Penhoat :
- Hervé Guyader (ca 1680 ; à Penhoat jusqu'en 1695, puis à Veuleury-Vihan),
- Michel Kerbaol (ca 1691-1732) et Nicolas Argouarch, son gendre (1698-1745),
- François Quentric (ca 1681-1762).

Pour le détail des familles, cliquer sur le petit livre vert . On remarquera les alliances familiales chez ces marchands toiliers. Louis Elégoet a déjà signalé que les "juloded" et les marchands toiliers se mariaient dans leur caste. C'est le cas ici, et la proximité des lieux de résidence a dû jouer également.

Autres renseignements extraits du cadastre ancien

• Le rappel des personnes ayant habité le village, cf les parcelles suivantes :
  • 926 Parc Mari Jaouen
  • 937 Parc Cam
  • 1042 Parc Quentric
  • 1044 Parc ar Bouroullec
  • 1057 Liors Fanchon :
    Sans vouloir jeter une pierre dans son jardin, Fanchon, quoique bonne chrétienne, n'en doutons pas... n'a pas eu l'honneur de nous être présentée.
  
  
• L'existence d'une pêcherie sur l'Elorn : cf parcelle n° 961 appelée "Coat ar besqueterez".

Personnes remarquables

• Les marchands toiliers (voir plus haut)
   
• Les fabriques de Pont-Christ :
   

  en 1760 et 1761	François Le Roux	° 21/03/1711 - Sclus, Ploudaniel, x 10/05/1735 - Plouneventer, avec Françoise Traouez + 21/03/1773 - Penhoat, à 61 ans
  en 1748 et 1749	Jean Pencreach	° 01/10/1696 - Cleuzever, Ploudiry x 14/11/1719 - Pont-Christ, avec Anne Quentric de Penhoat + 24/01/1765 - Penhoat à 68 ans
  en 1740 1741	Nicolas Hergouarch, honorable marchand	° 02/02/1688 - Sizun x 07/1716 - Pont-Christ, ép. Marguerite Kerbaol, de Penhoat + 10/06/1756 - Trebrit, Ploudiry
  en 1729	François Quentric
  en 1712	Guillaume Quentric	° vers 1651 x1 avec Barbe Madec x2 08/01/1699 - Pont-Christ, ép. Jeanne Le Roux de Kerfaven + 26/01/1731 à Penhoat, à 80 ans
  en 1704 et 1705	Michel Kerbaol, honorable marchand	° vers 1667 x1 avec Françoise Le Bihan x2 28/05/1691, St-Servais, ép. Marie Le Menez + 20/02/1732 à Penhoat à 65 ou 66 ans
  en 1688 et 1689	Herve Guyader, honorable marchand toilier	° vers 1657 x Catherine Rolland + 11/7/1733, Veuleury-Vihan à 76 ans En-tête du registre B.M.S. de Pont-Christ en 1689 : " Cahier pour servir à l'insertion des mariages, baptesmes et sépultures qui se feront pendant ceste présente année 1689 en l'église trefviale de Pont-Christ Bresal, psse de Ploudiry, à nous conseiller du roy soussigné et premier magistrat de Leon en la cour royale de Lesneven présenté par honorable homme Hervé Guiader marchand toillier à présent fabrique et gouverneur en ladite église. Ce jour second de l'an 1689. Ce présent cahier contenant 6 rollets, le premier et le dernier compris ".
  en 1660	Christophe Person
  en 1630	Robert Quentric

  
  
• Un second prêtre de Pont-Christ, Jean Quentric, avait sa demeure à Penhoat. Il était probablement apparenté aux Quentric de ce village :
  Le 14è jour de Xbre 1677 a esté inhumé en l'église treviale de Pont-Christ Ploudiry le corps de vénérable et discret missire Jan Quentric ptre desservant audit Pont-Christ quoy qu'il faisoit sa demeure au village de Penchoat paroisse de Plouneventer ayant reçu tous ses sacrements et assisté de missire Herve Quefelean ptre et recteur de Plouedern et de Jan Helleouet aussy ptre de St-Servais en foy de quoy ay signé ceste acte ledit jour et an. Yves Gardehault, ptre.

Le lieu noble de Penhoat

I - Quand on lit les B.M.S. de Pont-Christ, on voit fréquemment le village de Penhoat qualifié de "lieu noble" . Que signifie ce qualificatif ?

• A l'origine les terres nobles étaient les terres des nobles qui suivaient leur suzerain à la guerre. A ce titre, ces terres bénéficiaient d'exemptions fiscales qui se perpétuaient. Les résidents ne payaient pas les impôts, institués par le Duc de Bretagne, et qu'on appelait les "fouages". On les appelait ainsi car ils s'appliquaient aux familles, aux foyers donc, aux "feux" comme on disait à l'époque.
  Les terres roturières qui ne bénéficiaient pas de ces exemptions étaient majoritaires. D'où l'importance d'être déclaré noble et de transmettre ce titre à la terre, au lieu, au convenant ou à la métairie.
  En contre-partie, le propriétaire d'une terre ou d'un lieu noble devait s'acquitter de la chef-rente, qu'il payait à son seigneur de fief qui lui avait concédé cet "héritage" à titre de fief. Cette chef-rente était généralement une somme symbolique par rapport à la valeur du bien. Les terres nobles pouvaient être possédées par des roturiers.
   
• Pour la chasse aux fraudeurs, qui pour se dispenser du paiement des fouages se faisaient passer pour nobles, le pouvoir souverain, en l'occurrence le duc de Bretagne, organisait périodiquement des réformations, notamment en 1426. Grâce au livre d'Hervé Torchet La réformation des fouages de 1426 - Diocèse ou évêché de Léon nous disposons d'informations importantes sur les paroisses qui nous intéressent ici : Plouneventer, Ploudiry et Bodilis.
   
• Quel était donc la personne noble qui possédait Penhoat autrefois en 1426 ? Nous trouvons la réponse dans l'ouvrage cité : il s'agissait de Constance Coetdudavel, noble femme de "Pencoet" en Plouneventer. Malheureusement pour elle, sa déclaration de noble fut "contrariée" et elle fut contrainte de "payer". Malgré tout, on peut penser que, lors d'une réformation postérieure, son successeur fut mieux loti pour que Penhoat devienne un "lieu noble".

Toujours en lisant les B.M.S. de Pont-Christ, on voit qu'il y avait d'autres lieux nobles dans le périmètre de notre trève. Sans insister sur le lieu de Brezal lui-même, on peut citer : Brezalou, Keradoret, Kerfaven, La Rabine du Cloître. L'ouvrage d'Hervé Torchet nous indique les nobles de ces lieux qui ont eu plus de chance que Constance Coetdudavel :
- à Brezal (manoir de Brensal) : "Derien Brensal" et "Hervé an Mescam",
- à Keradoret : Edouard May,
- à Kerfaven : Jehan Le Moyne,
- à Trebrit (Tref Brit), dont dépendait la Rabine du Cloître ? : Salomon Le Ny.

Vue aérienne de Penhoat en 2004 - en contre-bas du village, L'Elorn et le virage dangereux de Kerfaven sur la D712.
 

Sources des informations

• Registres B.M.S. de Pont-Christ (ADB et ADQ)
• Base RECIF du CGF
• Cadastre de Saint-Servais - Plan : Section B - 1828 (ADQ 3 P 266/1)
• Cadastre de Saint-Servais - Tableau propriétés foncières de St-Servais : Section B dite du bourg (ADQ 3 P 266/2)
• La réformation des fouages de 1426 - Diocèse ou évêché de Léon par Hervé Torchet
• Répertoire des procès-verbaux de vente des biens nationaux : communes de Saint-Marc à Trézilidé dont Servais (ADQ 1 Q 1215)
• Vente de biens nationaux du 7 prairial an 4 au 6 frimaire an 6 (ADQ 1 Q 734)
• ... etc...

André J. Croguennec - Page créée le 24/5/2015.